Page:Mérimée - Carmen.djvu/326

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villes des mœurs nationales et des originaux. En province, on a encore des habitudes primitives et des préjugés, chose qui devient plus rare de jour en jour. Les gentilshommes campagnards, qui ne font qu’une fois dans leur vie le voyage de Saint-Pétersbourg, qui, vivant toute l’année dans leurs terres, mangent beaucoup, lisent peu et ne pensent guère, tels sont les types que M. Gogol affectionne, ou plutôt qu’il poursuit de ses railleries et de ses sarcasmes. On lui reproche, m’a-t-on dit, certain patriotisme provincial. Petit-Russien, il aurait je ne sais quelle prédilection pour la Petite-Russie au préjudice du reste de l’empire. Pour moi, je le trouve assez impartial ou même trop général dans ses critiques, trop sévère pour tout ce qui devient le sujet de ses observations. Pouchkine fut accusé, fort à tort à mon avis, de scepticisme, d’immoralité et de satanisme ; pourtant il a découvert dans un vieux manoir sa délicieuse Tatiana : on regrette que M. Gogol n’ait pas eu un bonheur semblable.

Je ne connais point les dates des différents ouvrages de M. Gogol, mais je serais porté à croire que ses nouvelles ont été publiées les premières. Il me semble y voir une certaine incertitude dans la manière de l’auteur, qui cherche, en tâtonnant un peu, le genre où