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MATEO FALCONE.

1829

En sortant de Porto-Vecchio et se dirigeant vers l’intérieur de l’île, on voit le terrain s’élever assez rapidement, et après trois heures de marche par des sentiers tortueux, obstrués par de gros quartiers de rocs, et quelquefois coupés par des ravins, on se trouve sur le bord d’un mâquis très-étendu. Le mâquis est la patrie des bergers corses et de quiconque s’est brouillé avec la justice. Il faut savoir que le laboureur corse, pour s’épargner la peine de fumer son champ, met le feu à une certaine étendue de bois : tant pis si la flamme se répand plus loin que besoin n’est, arrive que pourra ; on est sûr d’avoir une bonne récolte en semant sur cette terre fertilisée par les cendres des arbres qu’elle portait. Les épis enlevés, car on laisse la paille, qui donnerait de la peine à recueillir, les racines qui sont, restées en terre sans se consumer poussent au printemps suivant des cépées très-épaisses, qui en peu d’années parviennent à une hauteur de sept ou huit pieds. C’est cette manière de taillis fourré que l’on nomme mâquis. Différentes espèces d’arbres et d’arbrisseaux le composent, mêlés et confondus comme il plaît à Dieu. Ce n’est que la hache à la main que l’homme s’y ouvrirait un