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lente idée ! « Nous nous occuperons de remettre en honneur cette ancienne mode… » souligné… « dont je vous ai parlé, et que vous aimez autant que moi. P. S. Retenez Juliette aussi longtemps que vous le pourrez. » À bon entendeur… (Entre Juliette.) Eh bien ! pourquoi ces deux vases ? je ne vous en avais demandé qu’un.

Juliette. C’est pour la symétrie, madame.

La comtesse. La symétrie !… Remportez celui-là. Posez celui-ci à côté de la sonnette. Tenez, vous remettrez ce billet, avec ce livre, à madame de Sainte-Denize… Ha !… en rentrant, vous passerez chez Pitou, le libraire, et vous lui demanderez le Prince, de Machiavel ; retenez bien : le Prince, de Machiavel.

Juliette. Le Prince, de Machiavel ! Dame, madame, si c’est un roman nouveau, M. Pitou ne l’aura peut-être pas encore fait venir.

La comtesse. Il n’y a pas de bibliothèque où ce livre ne se trouve. Tenez, j’écris le titre : le Prince, de Machiavel, la meilleure traduction. (Juliette sort.) Enfin m’en voilà débarrassée. Pour François, il est sûr. — Que l’heure tarde à sonner ! — Je ne me sens pas de joie. Il me semble que je suis dans mon élément. Ah ! qu’une conspiration est une occupation agréable !

(Entre le comte des Tournelles.)

Scène III.

LA COMTESSE, LE COMTE.

La comtesse. Eh bien ! monsieur des Tournelles, l’instant approche ; vos terreurs se dissipent-elles ?

Le comte. Mes terreurs !… dites mes inquiétudes ; et, franchement, la circonstance les autorise. Conspirer dans ce temps-ci !… car nous conspirons. Je ne sais si vous comprenez ce qu’il y a de danger à conspirer dans un temps