Page:Mérimée - Colomba et autres contes et nouvelles.djvu/388

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j’ai une voix de chantre de cathédrale maintenant… la, la, la, la… Nous danserons ; je ferai la cour à la cousine, si le cousin n’est pas jaloux. Pas vrai que vous n’êtes pas jaloux, cousin ? Sacrament ! comme disent les Allemands, il faut s’amuser dans ce monde.

Le comte, bas à la comtesse Tâchez donc de l’éloigner.

La comtesse, de même. J’ai des projets sur lui.

Édouard. Cousin, à quelle heure dînez-vous ? Savez-vous que j’ai une faim de corsaire ? jamais je ne pourrai attendre le dîner.

Le comte. On va vous monter quelque chose dans votre chambre.

Édouard. Non, non, ici, en causant, je mangerai un morceau sur le pouce. Parbleu ! j’ai appris au régiment à parler en mangeant, sans perdre pour cela une seule bouchée. (Il appelle.) Holà ! hohé ! ici, hé !… Comment se nomment vos domestiques ? Allons ! hé !

La comtesse, après avoir sonné, à François qui entre. Donnez le pâté de gibier à monsieur. Quel vin voulez-vous ?

Édouard. Bourgogne, morbleu ! Avez-vous toujours de ce vin de Pomard que vous me disiez que vous vouliez garder pour mon retour d’Allemagne ?

La comtesse. Vous avez bonne mémoire. — Donnez une bouteille de vin de Pomard à monsieur. Vous vous dépêcherez, Édouard, n’est-ce pas ? Nous aurons besoin de la table tout à l’heure. — Monsieur des Tournelles, allez vous habiller ; Édouard vous excusera.

Édouard. Parbleu ! il serait joliment bête de faire des façons avec moi. — J’aurai bientôt fait, cousine ; je ne fais que tordre et avaler.

Le comte, bas à la comtesse. Comment pourrez-vous ?…

La comtesse. Laissez-moi faire.