Aller au contenu

Page:Mérimée - Portraits historiques et littéraires (1874).djvu/129

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
121
CHARLES NODIER.

courage de s’en séparer, et de le remettre aux soins du proscrit. Il espérait d’ailleurs que l’innocence de l’enfant protégerait la vie du vieillard, dont le patriotisme ne pouvait faire oublier la naissance. — « Je ne connais pas d’homme plus vertueux que toi, dit le juge à M. de Chantrans ; tu méritais de n’être pas né gentilhomme ; mais obéis à la loi ; emmène mon fils ; je te le confie ; tu lui apprendras à connaître la nature et la vérité. » C’était le style du temps. M. de Chantrans alla s’établir avec son pupille au hameau de Novilars, et dans cette charmante solitude ils attendirent la fin de la tempête.

Le vieil ingénieur voulait enseigner les mathématiques à son élève, espérant qu’elles pourraient régler et tempérer une imagination dont l’ardeur lui inspirait de sérieuses inquiétudes ; mais la géométrie n’avait point de charmes pour un enfant qui déjà griffonnait des vers. La poésie est un don inné dans sa famille. Un de ses oncles a laissé au théâtre une tragédie et des opéras estimés ; et la muse de Charles Nodier, vous le savez, messieurs, continue d’inspirer sa fille. L’étude de l’histoire naturelle, et surtout de l’entomologie, qui d’abord n’avait été qu’une récréation pour les deux