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Page:Mérimée - Théâtre de Clara Gazul, 1857.djvu/68

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en marche puissent arriver ici, et vous exterminer tous tant que vous êtes d’Espagnols dans cette île.

Don Juan. Que dites-vous ?… le résident !

Madame de Tourville. Le petit jeune homme qui était avec lui avait l’air de ne pas y consentir, il lui a même remontré combien sa conduite était affreuse… mais ce coquin de résident l’a menacé de le faire fusiller, et il a bien été obligé d’y consentir, quoique malgré lui, j’en suis sûre.

Don Juan. Et vous l’avez entendu ?

Madame de Tourville. De mes oreilles. Vous ne lui ferez pas de mal, n’est-ce pas, à ce petit jeune homme ?… Quant au résident, c’est un vieux scélérat bien taré, et qui est digne de tout votre courroux.

Don Juan. Je vais chez le marquis de La Romana, veuillez m’y accompagner.

Madame de Tourville. Au moins ne manquez pas le résident. Je suis encore tout émue de son infâme trahison… il faut le faire fusiller tout de suite, sans l’écouter… Pour l’autre…

Don Juan. Son affaire est claire.

Madame de Tourville. Vous m’avez promis de lui faire grâce… Mais écoutez, bon jeune homme… écoutez, mon enfant…

Don Juan. Ah ! ma bonne mère !

Madame de Tourville. Je vais vous amener ma fille, et, pendant que vous ferez votre paix avec elle, je m’en vais instruire de tout votre général ; de cette façon, nous ferons d’une pierre deux coups.

Don Juan. Allez vite auprès d’elle. Je reviens aussitôt.

Madame de Tourville. Non, restez. Je vous l’amène… — Elle est d’une innocence, cette pauvre Élisa… Ma foi, entre nous, je ne sais si son premier mari a été… son mari… c’était un vieux goutteux… Elle est d’une innocence… vous rirez.

Don Juan. Entrez vite.

Madame de Tourville. Une embuscade. Ne dites mot. Rangez-vous du côté de la porte. (Elle frappe.) C’est moi, c’est ta mère ; ouvre, Élisa.

Elle rentre.

Don Juan seul. Je ne sais si c’est le bon Dieu ou le diable