Aller au contenu

Page:Méry - La guerre du Nizam, Hachette, 1859.djvu/93

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Eh ! que voulez-vous que je fasse ici ? Si vous aviez une guerre européenne, régulière, je serais peut-être un embarras pour vous ; mais je puis très-bien me mêler à vos rangs, comme amateur, sans déranger votre stratégie… C’est ainsi que j’ai déjà fait vingt campagnes contre les tigres, les lions et les éléphants : vos Taugs sont de la même famille ; seulement le naturaliste Saavers ne les a pas classés. »

Le colonel répondit par un sourire et un geste d’adhésion, et fit un signe qui signifiait : « Suivez-moi. »

Ils montèrent l’escalier. Le colonel ouvrit une croisée dont le balcon était comme suspendu sur un abîme de verdure, du côté du couchant. Les rameaux des grands arbres flottaient contre la façade, et les feuilles jouaient avec les lames des persiennes. Une échelle de corde était liée au balcon. Douglas et sir Edward descendirent avec la promptitude et l’audace de gens exercés à grimper aux cimes des palmiers et aux mâts des vaisseaux.

Partout les hauts gazons amortissaient le bruit des pas du colonel et d’Edward. Nos deux amis, lancés dans les allées naturelles de la forêt, semblaient lutter de vitesse pour gagner le pari d’une course.

Le colonel Douglas courait sur un terrain connu, et tous les accidents de ces sentiers mystérieux et sauvages lui étaient familiers comme une grande rue de Londres.

Après deux heures d’élan furieux, il s’arrêta sur la lisière d’une forêt, au bord d’un lac.

« L’étoile de Léby n’est pas levée sur le mont Sérieh, dit-il à Edward. Les Taugs sont encore dans leurs antres. Les Taugs ne marchent qu’aux rayons de cette étoile. »

Il regarda la campagne, sombrement illuminée par