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Page:Maël - Une française au pôle Nord, 1900.djvu/226

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Jamais les hurlements précédemment ouïs ne leur étaient parvenus avec une telle force. Ils se regardèrent anxieux, n’osant formuler leurs doutes, se demandant en secret si cette rumeur lugubre n’était pas due à la présence d’un nombre inusité de carnassiers.

Les cris se rapprochaient de seconde en seconde ; la clameur devenait assourdissante. Bientôt elle parut déchirer la trame du brouillard, et, à l’aide de la longue-vue, il fut possible de discerner une longue bande noire s’avançant, roulant plutôt, sur la surface blanche du pack.

Alors seulement tout le monde comprit le cri jeté par les deux matelots.

« Les loups ! » prononça le lieutenant Hardy, qui ne put se défendre d’un frisson.

On frissonna autour de lui. Avec le magnétisme qui lui est propre, une même pensée avait traversé tous les esprits, les emplissant d’une indicible terreur.

Le cri jeté par leurs compagnons était un appel de détresse. Eux aussi avaient crié : Les loups !

Le commandant Lacrosse traduisit toutes les impressions en donnant un ordre bref :

« Hardy, commanda-t-il, prenez tout de suite la réserve avec vous. Je la porte à huit hommes. Nous ne pouvons laisser périr ainsi nos compagnons. »

Déjà le lieutenant rassemblait les hommes. En un clin d’œil l’escouade fut armée et descendit sur la glace. On la vit marcher résolument à la rencontre des carnassiers.

Mais les courageux marins n’avaient pas fait trois cents mètres sur le pack, qu’on les vit battre en retraite.

Ils revenaient sans se presser, gênés d’ailleurs par la diffi-