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Page:Maël - Une française au pôle Nord, 1900.djvu/241

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« Que c’est beau ! que c’est beau ! » répéta-t-elle à plusieurs reprises.

Ses yeux, un moment éblouis, s’étaient faits à la magie du spectacle. Voici que, maintenant, les explorateurs pouvaient mesurer du regard toute l’étendue du champ qui les portait. À moins de 1 mille, ce champ s’arrêtait, coupé nettement, à pic, et au delà une nappe d’un bleu sombre, pailletée d’or, lui faisait comme une bordure, sur laquelle le blanc du pack éclatait avec plus de puissance.

« La mer ! s’écria Isabelle. La mer libre, entièrement libre ! »

À ce cri, Hubert d’Ermont était accouru, suivi de tous les autres membres de l’expédition.

C’était bien la mer, en effet, une mer si liquide, si mouvante, qu’on n’aurait pu, en la considérant, se croire sous de telles latitudes, aussi voisins du pôle.

Hubert fit entendre une seconde exclamation :

« Oui, la mer ! Mais, après la mer, la ceinture de glaces ! »

Et il montrait de sa main tendue l’horizon du nord. Une autre ligne blanche s’y montrait, d’abord confondue avec le ciel pâle, mais, à cette heure, réverbérant les rayons du soleil avec une telle intensité que l’œil n’en pouvait soutenir l’éclat.

Et, cette fois, les voyageurs étaient renseignés. Non, d’Ermont et Schnecker ne s’étaient pas trompés ! Non, ils n’avaient point été les jouets d’une hallucination ! Ils l’avaient vue, de leurs yeux vue, cette muraille paléocrystique, ce rempart vierge dont le pôle se fait une armure prodigieuse contre les tentatives des mortels audacieux. Telle qu’elle apparaissait, elle justifiait les dires de ceux qui les premiers l’avaient aperçue.