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Page:Maël - Une française au pôle Nord, 1900.djvu/82

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lumineuses, et Schnecker, qui fut le montreur de lanterne magique, recueillit sa bonne part de bravos. À deux heures du matin, comme le jour baissait, on distribua la dernière tournée de punch, et tout le monde s’alla coucher, le cœur en paix et l’esprit en joie.

Une demi-heure plus tard, tout le monde dormait dans le campement, et le froid, insidieux et morose, refoulant le mercure dans le tube, faisait tomber la température extérieure à 20 degrés au-dessous de zéro.

Un seul homme ne dormait pas, c’était le chimiste Schnecker.

Il avait obtenu, dès le début de l’hivernage, de coucher dans le laboratoire dont il avait la suprême direction. Bien qu’en ce moment l’atmosphère s’abaissât considérablement dans le réduit, il se tenait debout devant son lit, le sourcil froncé, les doigts contractés.

Et, de temps à autre, une sourde imprécation jaillissait de ses lèvres :

« Oh ! ce d’Ermont maudit ! Comme je le hais ! S’est-il assez moqué de nous, tout à l’heure ! Avec quel ton de hautain persiflage n’a-t-il pas répondu à mes objections : « Vous le verrez, monsieur ! »

Il s’interrompit et fit trois pas dans la chambre.

« Tout de même, s’il avait raison ?… s’il disait vrai ? Est-ce vraiment possible ? Et quel est le corps permanent que son frère a pu solidifier ? Oui, lequel ? Je ne connais jusqu’ici que l’azote qui ait servi d’une manière probante à cette expérience. Mais que ferait-il de l’azote ? Rien. Nous n’avons pas à féconder les terres du Pôle, ni à rendre l’oxygène de ces régions moins comburant. D’ailleurs il a parlé d’un gaz à la fois combustible et agent. Serait-ce l’hydrogène ? »