Page:Maël - Une française au pôle Nord, 1900.djvu/86

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de Kéralio. C’était la mieux abritée. En ce moment même, la jeune fille, accompagnée de son père et du docteur Servan, écoutait Hubert d’Ermont développer ses théories.

Et le traître Schnecker, haletant, le cœur plein de fiel, put entendre comme un écho de ses propres paroles le lieutenant de vaisseau exposer à son auditoire restreint le secret duquel allait dépendre le succès de l’expédition.

« Oui, disait Hubert, ces objets que je vous ai montrés sont des cylindres d’aluminium, enfermant des tubes d’acier pleins forés dans le lingot même. Tous ces tubes aboutissent à un robinet fermé par un écrou à volant, qui permet l’échappement brusque ou gradué, selon qu’on le désire, du gaz hydrogène liquéfié qu’ils contiennent.

— Hydrogène ! ne purent s’empêcher de crier les trois auditeurs, en sursautant sur leurs chaises.

— Hydrogène ! répéta sourdement Schnecker, dont les poings se serrèrent. Du gaz hydrogène liquéfié ! Est-il possible ?…

— Oui, dit fièrement Hubert, dont l’œil eut une étincelle d’orgueil, et c’est là la découverte qui rend désormais immortel le nom de Marc d’Ermont, de mon frère ! »

L’Allemand avait reculé. Il ne sentait point le froid, il ne sentait que sa fureur. Dans ces ténèbres qui l’enveloppaient, sa pensée devenait lumineuse au fond de sa conscience qu’il gardait de sa haine et de son envie.

« La gloire de ton frère ! murmura-t-il enfin. Si tu as dit vrai, Hubert d’Ermont, si cette découverte admirable a été réellement faite, elle n’aura d’autre théâtre que la terre glaciale et désolée qui nous porte, et elle y mourra inconnue du reste des hommes. »