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LE CHANT DE L’ÉQUIPAGE

― Ah ! c’est l’Elisabeth, alors je retire ce que j’ai dit, parce que tu sais, un bâtiment comme celui-là pour prendre le vent de près, j’en connais pas beaucoup sur la Côte. Bien sûr, l’Elisabeth. Je vois bien ce que c’est que l’Elisabeth. Ah ! oui, c’est un bateau. Y’avait Trublé de Concarneau qui voulait l’acheter pour faire la pêche au large. Combien qu’il l’a payé, M Krühl ?

― T’en fais pas pour le prix. Celui qui l’a vendu n’a pas dû le donner. Sans compter que l’État achète tout en ce moment.

― C’est pourtant vrai.

Jusqu’au soir, Bébé-Salé, Boutron et le fils Palourde discoururent minutieusement sur les mérites comparatifs des bateaux à vendre, en vérité assez rares, sur la Côte.

Entraînés par le sujet, qui intéressait leur compétence, ils énumérèrent les qualités de tous les bateaux qu’ils avaient connus avec une sûreté de mémoire prodigieuse.

― C’est-i vrai, dit Boutron brusquement en s’adressant à Bébé-Salé. C’est-i vrai ce qu’on dit, que tu vas embarquer avec M. Krühl ? Tu sais comment je te dis ça, mais on en cause.

― Et si ça serait vrai, fit Bébé-Salé en retirant sa pipe de sa bouche sans dents.

― Vieille noix, t’es pu bon à rien. Qué qu’tu feras à bord, t’as pas seulement la force de hisser une trinquette.