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Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/138

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— Tu acceptes ?

— Je n’entends rien à la politique, dis-je au bout d’un instant. Quant à la fiancée, laissez-moi vivre comme un ours que je suis.

— Mais les ours se marient, me répliqua-t-il.

— Eh bien ! trouvez-moi une ourse : la grande Ourse, par exemple…

Mon père se mit à rire, et recommença à parler sérieusement. Je devais me lancer dans la politique pour plus de vingt raisons qu’il énuméra avec une singulière vélocité, en prenant des exemples parmi nos relations. Quant à la fiancée, il me suffirait de la voir. Aussitôt après l’avoir vue, j’irais de moi-même la demander à son père, sans plus tarder. Il essaya ainsi d’abord de la fascination, ensuite de la persuasion, ensuite de l’intimidation. Je ne répondais pas, je taillais la pointe d’un cure-dent, je faisais des boulettes de pain, souriant ou réfléchissant. Je n’étais, pour tout dire, ni rebelle ni docile à la proposition. Je me sentais abasourdi. Une partie de moi-même disait oui : une belle femme, une position politique n’étaient pas choses à dédaigner. L’autre partie disait que non ; la