Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/145

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Pourvu que ?

— Pourvu que je ne sois point obligé de les accepter conjointement. Je crois que je puis être séparément un homme marié et un homme politique…

— Tout homme qui entre dans la vie publique doit être marié, interrompit sentencieusement mon père. Mais il en sera comme il te plaira. Je me prête à tout, persuadé qu’il te sera suffisant de voir Virgilia. D’ailleurs, le Parlement et la fiancée, c’est tout un. Tu protestes… tu verras plus tard. C’est bon, j’accepte l’atermoiement, pourvu que…

— Pourvu que ? l’interrompis-je à mon tour en imitant sa voix.

— Ah ! farceur ! pourvu que tu ne restes pas ici, inutile, obscur et désespéré. Mon argent, mes soins, je ne les ai dépensés que pour te voir briller comme il convient, à moi, à toi, et à nous tous. Tu dois continuer à illustrer notre nom que tu perpétues. Écoute, j’ai soixante ans, mais s’il était nécessaire que je recommence ma vie, je le ferais sans hésiter une minute. Crains l’obscurité, Braz, fuis ce qui est infime. Les hommes valent de différentes façons, mais le