Page:Machado de Assis - Mémoires posthumes de Bras Cubas.djvu/432

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et je ne sais par quel phénomène de ventriloquie cérébrale (que les philologues me pardonnent cette phrase barbare), je murmurai cette parole profondément rétrospective : « Magnifique ! »

Si je possédais un laboratoire, j’inclurais dans ce livre un chapitre de chimie, où je décomposerais le remords en ses derniers éléments, avant de décider pourquoi Achilles promenait autour de Troie le cadavre de son adversaire, tandis que lady Macbeth promenait autour d’une salle de son palais sa manche tachée de sang. Mais je n’ai pas plus de laboratoire que je n’avais de remords. Je désirais tout simplement être ministre. En tous cas, avant de terminer ce chapitre, je dirai que je n’aurais voulu être ni Achilles ni lady Macbeth. Mais s’il m’avait fallu absolument choisir, j’aurais tout de même préféré traîner le cadavre que la souillure. J’y aurais gagné une ovation, les supplications de Priam, et une jolie réputation militaire et littéraire. Mais ce que j’écoutais, c’était le discours de Lobo Neves et non les supplications de Priam ; et je n’avais pas de remords.