Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/286

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leurs mon absolue conviction. Notez que je n’étais nullement étiolé. J’avais au contraire de bonnes couleurs et des muscles d’acier. Je finissais toujours mon devoir avant les autres, mais je passais le reste du temps à dessiner des nez sur le papier, ou à les graver dans le bois, occupation dénuée de noblesse et d’esthétisme, mais innocente en tout cas. Il en fut comme d’habitude ce jour-là. À peine eus-je fini que je me mis à reproduire le nez du professeur sous cinq ou six aspects divers, parmi lesquels je me rappelle l’air interrogatif, l’air admiratif, l’air dubitatif et l’air cogitatif. J’ignorais naturellement ces noms, pauvre étudiant d’école primaire que j’étais alors, mais instinctivement je distinguais ces expressions. Les condisciples achevèrent leur besogne ; je dus faire comme eux, remettre mon devoir et revenir à ma place.

En vérité, je me repentais d’être venu. J’étais prisonnier, et je mourais d’envie de gambader dehors ; je revoyais les champs et la montagne ; je pensais à mes compagnons de vagabondage, Chico la tuile, Americo et Carlos des petites échelles, la fine fleur du quartier et du genre