Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/61

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— Demandez à votre cœur, répondit-elle.

Camille prit un billet de dix milreis, et le lui donna. Les yeux de la cartomancienne lancèrent un éclair. Le prix habituel était deux milreis.

— Je vois que vous l’aimez bien, dit-elle… Et vous avez raison. Elle aussi, vous aime beaucoup… Allez, allez tranquille. Attention ! l’escalier est obscur. Mettez votre chapeau.

Elle avait déjà gardé le billet, et descendait après lui, tout en parlant avec un léger accent. En bas, Camille lui dit adieu, et descendit encore l’escalier qui conduisait à la rue, tandis que la cartomancienne, mise en gaîté par l’aubaine, remontait en chantant une barcarolle. Camille trouva le fiacre qui l’attendait. La rue était libre, il entra, et l’on partit à large trot.

Maintenant tout lui semblait meilleur ; les choses prenaient un autre aspect, le ciel était limpide et chaque visage jovial. Il en arriva à rire de ses craintes, qu’il traita de puériles. Il se rappela les termes de la lettre de Villela, et reconnut qu’ils étaient intimes et familiers. Où donc avait-il pris qu’ils eussent une tournure menaçante ? Il remarqua aussi qu’ils étaient