Page:Machado de Assis - Quelques contes.djvu/83

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était superfine, et bien plus précieuse que celle des œuvres terrestres ; et Sales, courbé, contrit, les mains jointes, le regard soumis, désemparé, résigné, me demandait de sauver sa femme. Si je la sauvais, il me promettait trois cents, — pas un de moins, — trois cents Pater Noster, et trois cents Ave Maria. Et il répétait emphatiquement : trois cents, trois cents, trois cents… Il renchérit, il atteignit mille Pater Noster, et mille Ave Maria. Il ne voyait pas cette somme écrite en lettres alphabétiques, mais en chiffres ; elle lui apparaissait ainsi plus nette et plus exacte, entraînant une obligation plus stricte, tout en augmentant la séduction. Et les paroles larmoyantes et tremblantes revinrent sur ses lèvres : « les plaies bénies, les anges du Seigneur »… mille, — mille, — mille. Les quatre chiffres prirent de telles proportions qu’ils remplirent l’église de haut en bas, et avec eux croissaient les efforts, et aussi la confiance de mon homme. Les mots sortaient plus rapides, plus impétueux, prononcés maintenant à haute voix, mille, mille, mille… Allons ! vous pouvez rire à satiété, conclut saint François de Sales. Et les autres saints rirent, en effet, non de ce