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LXXXVI INTRODUCTION


L’« exemple » de la jeune pousse, l’ente, qui, après quelques années, devient arbre et porte fleurs et fruits à la surprise et satisfaction du maître du jardin (v. 2434-70), n’est en réalité pas autre chose qu’une comparaison, une image un peu développée et mise dans un cadre particulier. C’est évidemment dans sa propre imagination que Guillaume a trouvé cette parabole présentée par lui sous forme de récit détaché.

C’est également le cas pour l’histoire du clerc d’Orléans que sa fiancée trahit et qui de douleur perd la raison (v. 2215-2307). Ce récit est si intimement lié au développement ultérieur du poème, il joue dans la condamnation finale de Guillaume un rôle si important, qu’il ne peut être qu’une invention du poète, ayant double but : fournir la preuve de ce qu’il a avancé et amener et motiver l’une de ses condamnations. On chercherait sans doute en vain la source de cette anecdote ailleurs que dans l’esprit de l’auteur. Faut-il en dire autant de l’épisode de la jeune fille dont l’amant est enlevé par la miort et qui en meurt malgré l’art des médecins et la tendresse d’une mère angoissée (v.1863-2012)? Le poète en commençant son récit par les mots : « Il n’a pas lonc temps qu’il avint », veut nous donner ce fait comme une chose réelle, arrivée de son temps, et en effet il pourrait bien s’agir de quelque fait divers dont il aurait entendu parler. Le contenu, en tout cas, en est trop mince pour avoir jamais pu constituer quelque conte indépendant. Mais l’histoire s’adapte si bien à la thèse qui forme le sujet du débat qu’elle semble plutôt avoir été forgée par Guillaume lui-même pour les besoins de sa cause. La façon détaillée et minutieusement exacte dont elle est présentée prouve suffisamment que ce conte était in-