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Page:Machaut - Le Voir Dit, 1875.djvu/120

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[vers 1445]
LE LIVRE

L’amant qu’elle a en ſon demaine.
Mais, finablement, m’a Léeſce
Deſconfit toute ma triſteſce,
Pour l’ymage plaiſant & pure
Qui eſtoit pourtraite en peinture.
Si me vi de tous poins gari,
Et le primtemps bel & joli,[1]
La douceur de la matinée,
L’erbe vert deſſous la rouſée,
La fleur & la fueille en boſcage.
Si devoie un pelerinage
À .ii. lieues près dou manoir
Où ma dame devoit manoir ;
Si m’aviſai que je iroie,
Et que mon veu adcompliroie ;
Et qu’en l’ombre de ce voiage,
Je verroie le dous viſage
Le dous oueil & le cointe atour,
Et le gentil corps fait à tour
Dont j’ay l’ymage belle & cointe,
Qui de pais & joie m’acointe ;
Et qui me fait parler & vivre,
Et faire pour s’amour ce livre.
Mais ainçois que je me partiſſe,
Il convenoit que j’eſcriſiſſe,
Et qu’humblement la merciaſſe
De ſa douce ymage qui paſſe
Plus que ſains, ſans compariſon,
Pour mes maus mettre à gariſon.
Si m’ordenay tout bellement
Bien & bel & faiticement,

  1. Et je vis le printemps…