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LE LIVRE
LAY et y a chant.[1].
I
Longuement me ſui tenus
De faire lais ;
Car d’amours eſtoie nus.
Mais, deſormais,
Feray chans & virelais ;
J’y ſuis tenus :
Qu’en amours me ſuis rendus
À tousjours-mais.
S’un petit ay eſté mus,
Je n’en puis mais ;
Car pris ſuis & retenus
Et au cuer trais,
Tout en un lieu, de .ii. trais
D’uns yeus fendus[2]
Vairs, poingnans, ſès & agus,
Rians & gais.
II
Car ma dame que Dieus gart
Pour un dous riant regart,
D’ardant Deſir fiſt un dart,
- ↑ Guillaume de Machaut paſſoit pour avoir excellé dans la compoſition des lais, dont les règles étoient des plus difficiles à obſerver. Il y a donc un certain intérêt à voir un de ceux qu’il croyoit apparemment avoir le mieux faits. En voici les règles d’après Euſtache Deſchamps : « Il y faut avoir douze couples, chaſcune partie en deux, qui font vingt-quatre. Et eſt la couple aucune fois de huit vers, qui font ſeize ; aucune fois de neuf, qui font dix-huit, aucune fois de dix qui font vingt, aucune fois de douze qui font vingt-quatre de vers entiers ou de vers coppez. Et convient que la taille de chacune couple à deux paragraphes ſoit d’une rime différente, d’une double couple à l’autre, excepté que la dernière couple de douze qui font vingt-quatre ſoit de pareille rime & d’autant de vers ſans redite comme la première. » Nous allons voir que Machaut a très-exactement obſervé ces règles compliquées.
- ↑ Comme s’il y avoit « d’une paire d’yeux. »