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L’ane d’or


AVERTISSEMENT

On sait que l’antiquité nous a lègue deux compositions littéraires qui portent le même titre que le poème qu’on va lire. L’une, la plus célèbre a été écrite par Apulée, philosophe, rhéteur et romancier latin, né en Afrique, dans la colonie romaine de Madaure, l’an 114 de Jésus-Christ ; elle est intitulée, tantôt Métamorphoses, tantôt les Milesiennes, et le plus souvent l’Ane d’or ; la seconde, dans des proportions beaucoup plus restreintes, a pour titre la Luciade ou l’Ane. Elle est attribuée par les uns à Lucien, par les autres à Lucius de Patras. Si nous rappelons ici ces souvenirs classiques, c’est pour constater que le poème de Machiavel n’a rien de commun avec les romans, que nous venons de citer, et qu’il faut plutôt en chercher l’idée première dans Plutarque au dialogue intitulé Les animaux de terre ont-ils plus d’adresse que ceux de mer ? Nous ajouterons que La Fontaine et Fénelon se sont, comme Machiavel, inspirés de Plutarque ; La Fontaine, dans les Compagnons d’Ulysse, Fénelon, dans le dialogue qui à titre : Ulysse et Gryllus. Plutarque, La Fontaine et Fénelon ont eu pour but de développer cette pensée ou plutôt ce paradoxe satirique, à savoir : Que la condition des animaux est supérieure à celle des hommes. Machiavel, au contraire, semble avoir circonscrit davantage son sujet, en enfermant la satire dans les limites mêmes de son pays. Voici ce que dit Voltaire : « On connaît peu l’Ane de Machiavel. Les dictionnaires qui en parlent disent que c’est un ouvrage de sa jeunesse ; il paraît pourtant qu’il était dans l’âge mûr, puisqu’il parle des malheurs qu’il a essuyés autrefois et très longtemps. L’ouvrage est une satire de ses contemporains. L’auteur voit beaucoup de Florentins, dont l’un est changé en chat, l’autre en dragon, celui-ci en chien qui