Page:Macrobe (Œuvres complètes), Varron (De la langue latine) Pomponius Méla (Œuvres complètes), avec la traduction en français, 1863.djvu/21

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que nos espérances ou nos craintes sont réalisées.

Ces sortes d’agitations, et d’autres de même espèce, ne nous obsèdent pendant la nuit que parce qu’elles avaient fatigué nos organes pendant le jour : enfants du sommeil, elles disparaissent avec lui.

Si les Latins ont appelé le rêve insomnium (objets vus en songe), ce n’est pas parce qu’il est annexé au songe d’une manière plus particulière que les autres modes énoncés ci-dessus, mais parce qu’il semble en faire partie aussi longtemps qu’il agit sur nous : le songe fini, le rêve ne nous offre aucun sens dont nous puissions faire notre profit ; sa nullité est caractérisée par Virgile :

Par là montent vers nous tous ces rêves légers, Des erreurs de la nuit prestiges mensongers.

Par cœlum, le poète entend la région des vivants, placée à égale distance de l’empire des morts et du séjour des dieux. Lorsqu’il peint l’amour et ses inquiétudes toujours suivies de rêves, il s’exprime ainsi :

 Les charmes du héros sont gravés dans son cœur. La voix d’Énée encor résonne à son oreille, Et sa brûlante nuit n’est qu’une longue veille.

Ensuite il fait dire à la reine :

……………………… Anne, sœur bien-aimée, Par quel rêve effrayant mon âme est comprimée !

Quant au spectre, il s’offre à nous dans ces instants où l’on n’est ni parfaitement éveillé, ni tout à fait endormi. Au moment où nous allons céder à l’influence des vapeurs somnifères, nous nous croyons assaillis par des figures fantastiques, dont les formes n’ont pas d’analogue dans la nature ; ou bien nous les voyons errer çà et là autour de nous, sous des aspects divers qui nous inspirent la gaieté ou la tristesse. Le cauchemar appartient à ce genre. Le vulgaire est persuadé que cette forte pression sur l’estomac, qu’on éprouve en dormant, est une attaque de ce spectre qui nous accable de tout son poids. Nous avons dit que ces deux genres ne peuvent nous aider à lire dans l’avenir ; mais les trois autres nous en offrent les moyens.

L’oracle se manifeste, lorsqu’un personnage vénérable et imposant, tel qu’un père, une mère, un ministre de la religion, la Divinité elle-même, nous apparaît pendant notre sommeil pour nous instruire de ce que nous devons ou ne devons pas faire, de ce qui nous arrivera ou ne nous arrivera pas.

La vision a lieu, lorsque les personnes ou les choses que nous verrons en réalité plus tard se présentent à nous telles qu’elles seront alors.

J’ai un ami qui voyage, et que je n’attends pas encore ; une vision me l’offre de retour. À mon réveil, je vais au-devant de lui, et nous tombons dans les bras l’un de l’autre. Il me semble que l’on me confie un dépôt ; et le jour luit à peine, que la personne que j’avais vue en dormant vient me prier d’être dépositaire d’une somme d’argent qu’elle met sous la sauvegarde de ma loyauté.

Le songe proprement dit ne nous fait ses communications que dans un style figuré, et tellement plein d’obscurités, qu’il exige le secours de l’interprétation. Nous ne définirons pas ses effets, parce qu’il n’est personne qui ne les connaisse.

Ce genre se subdivise en cinq espèces ; car un songe peut nous être particulier, ou étranger, ou commun avec d’autres ; il peut concerner la chose publique ou l’universalité des choses. Dans le premier