Page:Macrobe (Œuvres complètes), Varron (De la langue latine) Pomponius Méla (Œuvres complètes), avec la traduction en français, 1863.djvu/229

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tre au-dessus de celui d'Agathon, même après le magnifique éloge que Platon a fait de ce dernier? En effet, le roi de notre festin n'est pas inférieur à Socrate par son caractère moral; et comme philosophe, il n'a pas moins d'influence que lui sur sa patrie. Quant à vous tous qui êtes ici présents, vos vertus sont trop éminentes pour que personne puisse vous comparer à des poètes comiques, à cet Alcibiade qui fut si fort pour le crime, et à tous ceux enfin qui fréquentaient la table d'Agathon. - Parle mieux, je te prie, dit Praetextatus ; plus de révérence pour la gloire de Socrate ! car pour tous les autres qui assistèrent à ce banquet, qui pourrait contester leur infériorité respectivement à des hommes aussi éclairés que le sont nos convives? Mais dis-moi, Aviénus, à quoi tend ta comparaison?

- C'est pour en venir, répondit-il, à dire qu'il y en eut parmi ceux-là qui ne craignirent pas de proposer d'introduire une de ces joueuses d'instruments à cordes, formées artificiellement à une souplesse plus que naturelle, qui par les charmes de la mélodie et les attraits de la danse vint récréer nos philosophes. Cela se fit pour célébrer la victoire d'Agathon. Quant à nous, nous ne cherchons point à rendre honneur au dieu dont nous célébrons la fête, en y mêlant la volupté. Et toutefois je n'ignore pas que vous ne placez point au rang des biens la tristesse et un front obscurci de nuages, et que vous n'êtes pas grands admirateurs de ce Crassus qui, comme l'écrit Cicéron d'après Lucilius, ne rit qu'une seule fois dans sa vie.

- Praetextatus ayant répondu à ce discours que ses Pénates n'étaient point accoutumés aux plaisirs folâtres, qui d'ailleurs ne devaient point être introduits au milieu d'une aussi grave réunion, Symmaque repartit :

- Puisque pendant les Saturnales, « les meilleurs des jours, » ainsi que le dit le poète de Vérone, nous ne devons ni proscrire le plaisir comme un ennemi, à l'exemple des stoïciens, ni, comme les épicuriens, y placer le souverain bonheur, imaginons des récréations d'où l'indécence soit bannie. Je crois les avoir découvertes, si je ne me trompe: elles consisteront à nous raconter mutuellement les plaisanteries des hommes illustres de l'antiquité, recueillies de nos diverses lectures. Que ces doctes jeux, que ces amusements littéraires nous tiennent lieu de ces bateleurs, de ces acteurs planipèdes, qui profèrent des paroles déshonnêtes et équivoques, couvertes des apparences de la modestie et de la pudeur. Cet exercice a paru à nos pères digne de leur étude et de leur application. En effet, j'observerai d'abord que deux des hommes les plus éloquents de l'antiquité, le poète comique Plaute et l'orateur Tullius, se distinguèrent tous deux par la finesse de leurs plaisanteries. Plaute se signala tellement dans ce genre, qu'après sa mort on le reconnut, à la profusion des saillies, dans des comédies dont l'auteur était incertain. Quant à Cicéron, ceux qui ont lu le recueil qu'a composé son affranchi, des bons mots de son maître, recueil que quelques-uns lui attribuent à lui-même, savent combien il a excellé en ce genre. Qui ignore aussi que ses ennemis l'appelaient bouffon consulaire, expression que Vatinius introduisit dans son oraison ? Si je ne craignais d'être trop long, je rapporterais dans quelles causes défendant des accusés très gravement incriminés, il les sauva avec des plaisanteries, comme par exemple L. Flaccus, qu'il fit absoudre des concussions les plus manifestes par