Page:Macrobe (Œuvres complètes), Varron (De la langue latine) Pomponius Méla (Œuvres complètes), avec la traduction en français, 1863.djvu/252

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plutôt du vin. grec, mêlé avec du miel? Mangeons une grive grasse, un bon poisson, un loup du pays, pêché entre les deux ponts. »

Telles sont les expressions de Titius. Lucile, poète mordant et satirique, montre assez qu'il n'ignorait pas l'excellent goût du poisson qu'on prenait entre les deux ponts ; car il lui donne les épithètes de friand et de tatillon, parce qu'il venait, le long du rivage, à la recherche des immondices. On appelait proprement tatillons ceux qui, arrivant les derniers au festin du temple d'Hercule, léchaient les écuelles (catillos). Voici les vers de Lucile:

Fingere praeterea adferri quod quisque volebat.

Illum sumina ducebant atque altilium lanx:

Hunc pontes Tiberinos duo inter captus catillo.

« Peindre chacun qui se fait apporter ce qui lui convenait : l'un des tétines de truie qui vient de mettre bas; l'autre, un pâté de volaille grasse; l'autre, un tatillon pris entre les deux ponts du Tibre. »

CHAPITRE XIII. Des lois portées contre le luxe des anciens Romains. (CHAPITRE XVI du livre III dans LACUS CURTIUS)

Je serais long, si je voulais énumérer toutes les inventions que la gourmandise des anciens Romains leur suggéra, et qu'ils mirent en pratique; c'est ce qui fut cause qu'on proposa au peuple un si grandnombre de lois sur les dépenses des festins, et qu'on ordonna de dîner et de souper les portes ouvertes, afin que le regard des citoyens lmposât des bornes au luxe. La première loi qui fut proposée au peuple touchant les festins, est la loi Orchia; elle le fut par C. Orchius, tribun du peuple, d'après la décision du sénat, la troisième année que Caton était censeur. Je n'en rapporte point le texte, parce qu'il est trop long. Son objet était de limiter le nombre des convives. C'était contre l'infraction de cette disposition de la loi, que Caton tonnait dans ses discours. La nécessité d'une nouvelle loi s'étant fait sentir, la loi Fannia fut portée, vingt-deux ans après la loi Orchia, l'an 588 de la fondation,de Rome, selon l'opinion d'Aulu-Gelle. Sammonicus Sérénus s'exprime ainsi au sujet de cette loi

Lex Fannia, sanctissimi Augusti, ingenti omnium ordinum consensu pervenit ad populum: neque eam praetores aut tribuni, ut plerasque alias, sed ex omnium bonorum consilio et sententia ipsi consules pertulerunt, cum res publica ex luxuria conviviorum maiora quam credi potest detrimenta pateretur, siquidem eo res redierat, ut gula inlecti plerique ingenui pueri pudicitiam et libertatem suam venditarent, plerique ex plebe Romana vino madidi in comitium venirent, et ebrii de rei publicae salute consulerent

« La loi Fannia, très saints augustes, fut proposée au peuple, de l'avis unanime de tous les ordres; elle ne fut point présentée, comme la plupart des autres, par les préteurs ou les tribuns, mais par les consuls eux-mêmes, de l'avis et par le conseil de tous les bons citoyens, attendu que le luxe des festins nuisait à la république plus qu'on ne pourrait se l'imaginer;. car la chose était venue à un tel point, que plusieurs jeunes gens ingénus trafiquaient de leur liberté et de leur vertu pour satisfaire leur gourmandise, et que plusieurs citoyens romains arrivaient au comice gorgés de vin, et décidaient, ivres, du sort de la république. »

Telles sont les paroles de Sammonicus. La loi Fannia surpassait la sévérité de la loi Orchia, en ce que cette dernière ne faisait que circonscrire le nombre des convives, ce qui n'empêchait pas de manger son bien avec un petit nombre de personnes; tandis que la loi Fannia borna la dépense des repas à cent as : ce qui lui fit donner par le poète Lucilius, avec sa causticité ordinaire, le nom de centussis. Au bout de dix-huit ans, la