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DESCRIPTION DE LA TERRE, LIV. I.

insensiblement de sa largeur jusqu’à son extrémité, où elle est enfin plus étroite qu’en aucun autre endroit. Son territoire est d’une fertilité merveilleuse dans les régions les plus peuplées ; car elle est en grande partie déserte, soit parce que la plupart de ses contrées, couvertes de sables stériles, n’offrent aucune ressource à la culture, soit parce que la chaleur et l’aridité du climat les rendent inhabitables, soit parce qu’elles sont infestées par une multitude d’animaux malfaisants de divers genres.

La mer qui baigne l’Afrique se nomme Libyque au septentrion (9), Éthiopique au midi, Atlantique à l’occident. Sur les bords de la mer Libyque on rencontre d’abord, tout près du Nil, une province appelée Cyrénaïque. A la suite est une contrée qui, comme la partie du monde à laquelle elle appartient, porte le nom d’Afrique. Le reste de la côte est habité par les Numides et les Maures. Mais ces derniers occupent les rivages de la mer Atlantique. Plus au sud, sont les Nigritiens et les Pharusiens, jusqu’aux Éthiopiens, qui possèdent la suite de ce littoral et tout le côté qui regarde le midi jusqu’aux confins de l’Asie.

Au-dessus des régions baignées par la mer Libyque, sont les Liby-Égyptiens (10), les Leuco-Éthiopiens et les Gétules, nation nombreuse, et répandue dans plusieurs contrées. Plus loin est un vaste désert entièrement inhabitable, au delà duquel on place, d’orient en occident, d’abord les Garamantes, puis les Augiles et les Troglodytes, et enfin les Atlantes. Plus avant encore, en supposant qu’on veuille y croire, l’Afrique recèle des Ægipans, des Blémyes, des Gamphasantes et des Satyres, espèces de peuplades errantes à l’aventure, sans toits, sans demeures fixes, et qui, présentant à peine quelques traits humains dans leur conformation, ont plus de rapport avec les animaux qu’avec les hommes.

Voilà le tableau général de notre univers, ses grandes divisions, leurs formes et leurs différents peuples. Mon plan me conduisant maintenant à la description détaillée des côtes, je commencerai de préférence par celles qui forment la partie droite du canal par lequel notre mer s’introduit dans les terres, et je visiterai successivement toutes les autres dans l’ordre de leur position respective. Après avoir ainsi décrit les bords intérieurs de notre hémisphère, je décrirai pareillement ce grand contour que baigne l’Océan ; et ma tâche sera remplie, lorsqu’ayant parcouru la terre au dedans comme au dehors, je serai de retour au même point où j’aurai commencé ma course.

CHAP. V. — Description particulière de l’Afrique. — la Mauritanie (11).

L’océan Atlantique baigne, comme on l’a dit, les côtes occidentales de la terre. Si de cette mer on veut pénétrer dans la nôtre, on rencontre l’Hispanie à gauche, et la Mauritanie à droite. Par l’une commence l’Europe, et par l’autre l’Afrique. La côte de la Mauritanie[1] s’étend jusqu’au Mulucha, depuis un promontoire appelé par les Grecs Ampelousia[2], nom différent de celui que lui donnent les Africains, quoiqu’ils aient tous deux la même signification. Ce promontoire renferme un antre consacré à Hercule, au delà duquel est Tingé[3], ville très-

  1. La Mauritanie de Méla comprenait l’empire de Maroc, et une partie de l’Algérie occidentale.
  2. Ce nom vient du grec ἄμπελος (vigne), parce qu’on y cultivait d’excellents vignobles. En langue punique, ce promontoire était appelé Cotès ; c’est aujourd’hui le cap Spartel.
  3. Aujourd’hui Tanger.