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Chap. XX. Des différents noms du soleil, et de sa grandeur.

Ce n’est pas un abus de mots, ni une louange outrée de la part de Cicéron, que tous ces noms qu’il donne au soleil, de chef, de roi, de modérateur des autres flambeaux célestes, d’intelligence et de principe régulateur du monde ; ces titres sont l’expression vraie des attributs de cet astre. Voici ce que dit Platon dans son Timée, en parlant des huit sphères : « Dieu, voulant assujettir à des règles immuables et faciles à connaître les révolutions plus ou moins promptes de ces globes, alluma, dans la seconde région circulaire, en remontant de la terre, les feux de l’étoile que nous nommons soleil. » Qui ne croirait, d’après cette manière de s’exprimer, que les autres corps mobiles empruntent leur lumière du flambeau du jour ? Mais Cicéron, bien convaincu que tous brillent de leur propre éclat, et que la lune seule, comme souvent nous l’avons dit, est privée de cet avantage, donne un sens plus clair à l’énoncé de Platon, et fait entendre en même temps que le soleil est le grand réservoir de la lumière ; car non seulement il dit de cet astre qu’il est le chef, le roi et le modérateur des autres flambeaux célestes (ces derniers mots prouvent qu’il n’ignore pas que les planètes ont leur lumière propre), mais cette qualification de chef et de roi des autres corps lumineux a chez lui la même acception que celle de source de la lumière éthérée, qu’emploie Héraclite.

Le soleil est le chef des astres, parce que sa majestueuse splendeur lui assigne parmi eux le rang le plus distingué ; il est leur roi, parce qu’il paraît seul grand entre tous : aussi son nom latin est-il dérivé d’un mot de cet idiome qui signifie seul. Il est le modérateur des autres astres, parce qu’il fixe les limites dans lesquelles ils sont forcés d’opérer leurs mouvements directs et rétrogrades. En effet, chaque étoile errante doit parcourir un espace déterminé, avant d’atteindre le point de son plus grand éloignement du soleil. Arrivée à ce point, qu’elle ne peut dépasser, elle semble rétrograder : et lorsqu’elle est parvenue â la limite fixée pour son mouvement rétrograde, elle reprend de nouveau son mouvement direct. Tous les corps lumineux voient donc dans le soleil le puissant modérateur de leur course circulaire. Son nom d’intelligence du monde répond à celui de cœur du ciel, que lui ont donné les physiciens ; et ce nom lui est bien dû, car ces phénomènes que nous voyons au ciel suivre des lois immuables, cette vicissitude des jours et des nuits, leur durée respective, alternativement plus longue ou plus courte, leur parfaite égalité à certaines époques de l’année, cette chaleur modérée et bienfaisante du printemps, ces feux brûlants du Cancer et du Lion, la douce tiédeur des vents d’automne, et le froid rigoureux qui sépare les deux saisons tempérées, tous ces effets sont le résultat de la marche régulière d’un être intelligent. C’est donc avec raison qu’on a nommé cœur du ciel l’astre dont tous les actes sont empreints de l’entendement divin.

Cette dénomination convient d’autant mieux, qu’il est dans la nature du fluide igné d’être toujours en mouvement. Or, nous avons dit plus haut que le soleil avait reçu le nom de source de la lumière éthérée ; il est donc pour ce fluide ce que le cœur est pour l’être animé. Le mouvement est une propriété inhérente à ce viscère ; et, quelle que soit la cause qui suspende un