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Page:Maeterlinck - La Vie des abeilles.djvu/232

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de garder, à titre d’exception, un reste d’existence.

C’est que dans l’hybridité, dans la variabilité (notamment dans les variations simultanées, appelées corrélation de croissance), dans l’instinct, dans les procédés de la concurrence vitale, dans la sélection, dans la succession géologique et dans la distribution géographique des êtres organisés, dans les affinités mutuelles, comme partout ailleurs, la pensée de la nature est tatillonne et négligente, économe et gâcheuse, prévoyante et inattentive, inconstante et inébranlable, agitée et immobile, une et innombrable, grandiose et mesquine dans le même moment et le même phénomène. Alors qu’elle avait devant elle le champ immense et vierge de la simplicité, elle le peuple de petites erreurs, de petites lois contradictoires, de petits problèmes difficiles qui s’égarent dans l’existence comme des troupeaux aveugles. Il est vrai que tout cela se passe dans notre œil qui ne reflète qu’une réalité appropriée à notre taille et à nos besoins, et que rien ne nous autorise à croire que la nature perde de vue ses causes et ses résultats égarés.

En tout cas, il est rare qu’elle leur permette d’aller trop loin, de s’approcher de régions