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LA FOUX-AUX-ROSES

vous venez de dire une bêtise ; laissez M. Bernaudat chez lui ; je connais quelqu’un qui prendra soin de votre patron mieux que tous les amis du monde… À quelle heure part le premier train ?

— À trois heures, mademoiselle.

— Il en est deux, ne perdons pas de temps. Vite à la bastide ! »

Irène, qui connaissait les manières originales de sa tante, sécha ses larmes et passa son bras sous celui de son cousin.

« Allons, dit-elle tout bas, je suis sûre qu’elle a une bonne idée ! »

Ils emboîtèrent le pas derrière Mlle Dorothée, pendant que Bosque, qui suivait sans trop savoir si on l’y avait invité, marmottait entre ses dents :

« Qu’est-ce qui lui prend ? elle court comme une autruche ; nous ne sommes pourtant pas sur la route de Vintimille.

— Attendez cinq minutes », ordonna Mlle Lissac comme on arrivait à la bastide.

Et elle s’élança dans l’escalier en appelant Marie-Louise.

« Y comprenez-vous quelque chose ? de manda Norbert surpris.

— Pas encore, répondit sa cousine, mais, je vous le répète : lorsque tante Dor se mêle d’une affaire, cela finit toujours bien.

— Elle écrit peut-être à la personne qui ira soigner papa… ah ! mais non, elle redescend déjà… »

Elle rentrait, en effet, la tante Dor, coiffée de son chapeau, couverte de son vêtement de sortie, tenant d’une main le parasol café au lait fraîchement réparé, et, de l’autre, l’antique sac de voyage du père Lissac.

Bosque et les enfants la regardèrent avec plus de stupeur encore que lorsqu’elle avait ouvert le pont fermé.

« Norbert, dit-elle en désignant la canne sculptée, prends ceci, c’est une relique dont Irène te dira l’histoire, ce sera un souvenir de ta vieille cousine !… n’oublie pas mes recommandations pour ta mère et mets le docteur Ortiz dans la confidence. Toi, petite, tache d’être raisonnable… Bosque, ayez l’obligeance de prévenir aujourd’hui Nanette Raybaud que je lui confie ma nièce Irène et que je la prie de s’établir ici en mon absence… Au revoir, mes enfants, j’ai peur de manquer le train. »

Une triple exclamation salua en même temps ces paroles :

« Tu pars ! tante Dor ?