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À une première lecture, ces nuances avaient échappé à Marcenay. Le fait brutal l’avait trop violemment saisi à la gorge ; il n’avait vu que lui. Mais au matin, un peu calmé, en relisant le mémoire d’Odule, il sentit la pitié prendre la place de la colère humiliée qui l’avait écrasé la veille.

Oui, le coupable avait une excuse : son constant désir de réparer le dommage. Il était pardonnable, pardonnable surtout parce qu’il avait beaucoup souffert de sa faute. L’oncle Charlot penserait ainsi, Pierre en était certain, et cela lui rendait moins pénible la confidence à faire.

Car de lui tout cacher… cela ne se pouvait…

La part de fortune qui appartenait au jeune homme en totalité suffirait-elle ? Rien de moins certain. Il entendait avoir ses coudées franches, être libre de disposer du tout s’il le fallait.

Et sa tante ?

Que de malice gît encore au fond du cœur le plus sincèrement bon ! Le mécompte de Caroline n’amenait qu’un sourire sur les lèvres de Pierre.

Cela le divertissait de se la représenter déconfite, ses rêves en fumée, sa rapacité punie.

Vers neuf heures, il descendit, la lettre d’Odule à la main. Ses traits rassérénés ne gardaient plus que la trace d’un peu de fatigue. Il appela sa tante en passant et tous les deux entrèrent chez le vieillard, qui venait seulement de s’éveiller.