Page:Magog - L'homme qui devint gorille, publié dans l'Écho d'Alger du 18 nov au 27 déc 1925.djvu/129

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Et ses mains étreignirent désespérément son crâne.

— Mais, pour cela, il faut être libre, dit Violette.

— Libre ! ricana amèrement le gorille.

— Le savant l’a dit : vous êtes un homme.

— Un homme !

— Oui, malgré… malgré votre apparence… La pensée est tout… Le cerveau prime la forme… Je répète les mots du savant… Vous êtes un homme, puisque votre pensée, votre intelligence, vous souvenirs sont humains… C’est cela qui vous fait vous ; c’est par eux que vous êtes… pour moi… que vous êtes Roland, malgré tout, toujours !

— Violette ! vous l’avez dit, c’est terrible !

— Non. Vous n’êtes pas seul, Roland, puisque j’ai reconnu votre pensée. Je serai courageuse. Soyez-le ! À nous deux, nous déchiffrerons l’énigme. Je viens vous délivrer. Sortez de cette affreuse cage.

De ses mains frêles, elle tenta d’ébranler les barreaux.

Son geste rendit Godolphin à lui-même.

— Minute ! la petite dame, fit-il en s’avançant. Ça ne s’ouvre pas comme ça ! Et puis, faut pas oublier que c’t’ami est en pénitence.

Violette se retourna vers lui, presque impérieuse.

— Ouvrez ! ordonna-t-elle.

« Celui que vous croyez un singe est un homme. »

Anxieuse, elle guetta l’effet de ses paroles.

Godolphin n’en paraissait pas autrement ému.

— Il m’a déjà servi ça, prononça-t-il avec indulgence.

Découragée, Violette considérait son front bas et têtu, ses yeux infiniment moins intelligents que ceux du singe dont il niait l’humanité. Elle parut comprendre l’impossibilité de convaincre cet être borné.