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envahit les traits des deux hommes.

Mais, tandis que le plus jeune, les lèvres serrées, se contentait de foudroyer du regard l’audacieux indiscret, la fureur du plus âgé fit explosion dans une bruyante apostrophe.

— Comment êtes-vous là ? Que voulez-vous ?

— Le docteur Fringue ? demanda l’inconnu, sans se démonter.

— C’est moi…

— Je désire vous parler. Je l’ai dit tout à l’heure à monsieur.

— Qui vous a envoyé paître ? comme il le devait ! s’écria le docteur avec une fureur croissante. On n’entre pas ici.

— Pourtant, j’y suis, dit l’inconnu avec une satisfaction visible.

— C’est inqualifiable ! C’est une violation de domicile !

— Dites un cambriolage, aggravé d’effraction, sourit l’inconnu, imperturbable en jouant avec la tige de fer qui lui avait servi de passe-partout.

— Vous l’avouez ! Savez-vous, monsieur qu’il pourra vous en cuire ? s’écria le savant exaspéré par tant d’aplomb. La loi nous donne le droit de n’être point tendre vis-à-vis d’intrus de votre espèce.

Silencieusement, le jeune acolyte du médecin s’empara d’un scalpel et en examina le tranchant avec un sourire féroce.

— Docteur, dit l’inconnu d’une voix légèrement altérée, nous perdons notre temps en balivernes. Vous pensez bien que si j’ai usé de semblables moyens pour parvenir jusqu’à vous, c’est qu’apparemment j’ai quelque chose de sérieux à vous communiquer. Le plus simple est de m’entendre.

Le docteur regarda son aide d’un air indécis et maussade.

Celui-ci, d’un geste à peine esquissé, montra l’autre pièce : puis ses yeux, décrivant un arc de cercle, que suivit sa tête, se tournèrent avec une expression de regret vers la table qu’il masquait.