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Ses manières à l’égard du Corse se ressentirent de ces pensées secrètes ; il en arriva à le traiter plus familièrement, plus affectueusement et à l’introduire peu à peu dans son intimité. Rue Anatole-de-la-Forge, Pasquale Borsetti fut chez lui. Par la force de l’habitude, il sembla bientôt qu’il était de la famille ; on le traitait, en conséquence, sans préciser encore à quel titre il en ferait partie. Mais cela lui conférait des droits pour plus tard.

En somme, la discrétion du Corse le servait mieux que, les plus pressantes sollicitations.

Quand un laps de temps suffisamment décent se fut écoulé, M. Sarmange exigea de Violette, qu’elle reparût dans le monde, qu’elle frôlât la joie des autres pour s’en imprégner, et s’en étourdir. Elle dut accompagner ses parents dans les théâtres convenables, subir les orchestres les plus bruyants et les foules les plus tapageuses.

La méthode réussit avec certaines natures, suffisamment extériorisées pour être sans cesse la proie des milieux dans lesquels elles évoluent et refléter l’état d’esprit moyen de la masse. D’autres, possédant la faculté de se concentrer et s’isoler en elles, continuent à vivre leur chagrin au milieu du tumulte.

Violette était de ces dernières. Un cadre sombre n’était point indispensable à sa tristesse. Elle céda au vœu de son père, mais n’oublia point.

Le programme des Folies-Olympiques entre ses doigts fins — ce programme dont la couverture représentait la silhouette du merveilleux gorille — c’était à Roland Missandier qu’elle songeait. Et chose bizarre, dont l’obsession la faisait frissonner, elle revoyait le dément dans une attitude infiniment plus simiesque que celle prêtée au gorille par l’illustrateur du programme.

Après des airs américains, accompagnant des clowneries ou des acrobaties, le rideau