Page:Magre – Conseils à un jeune homme pauvre qui vient faire de la littérature à Paris, 1908.djvu/79

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Mais je n’ai pas osé. Devant toi, jeune homme pauvre, une grande timidité m’a saisi. Je me serais nommé et tu m’aurais dit :

Qui êtes-vous ?

Et puis, par la puissance d’une invraisemblable espérance, n’aurais-tu pas souri de mes paroles ?

Et puis, quand je t’aurais dit la nécessité d’un effort patient et quotidien pour résister à tous tes protecteurs et ne pas obtenir les palmes académiques, peut-être, écartant ton pardessus et me montrant ta boutonnière, m’aurais-tu répondu avec orgueil.

Je les ai.

Aussi je t’ai regardé t’éloigner, chétif et mince, parmi les omnibus terribles, les maisons immenses. Tu n’avais pas l’air de connaître ta petitesse ; tu tenais ta canne comme une épée. Et j’ai admiré avec quelle autorité peut résonner sur le pavé de la rue une bottine où il y a un trou.