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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/16

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LA LUXURE DE GRENADE

reur pourrait le pousser ? Puis, le loueur de chevaux le plus proche dans Triana était couché et n’ouvrait qu’au lever du soleil la porte de son écurie.

Almazan s’était assis dans son fauteuil et il cherchait à reconstituer l’enchaînement des faits qui avait pu amener ce cadavre à côté de lui.

Almazan n’avait pas connu son père et c’est à peine s’il retrouvait l’image de sa mère dans les premiers souvenirs de son enfance.

Il revoyait confusément un visage bronzé encadré de longues tresses brunes, des prunelles ardentes et il entendait une chanson arabe qu’elle chantait au soleil couchant, le long des remparts d’Almazan et qui était d’une tristesse inexprimable. Il portait le nom de la ville où il était né. Il avait quitté Almazan à la mort de sa mère pour n’y plus revenir.

— C’est dommage, il est trop beau !
avait dit l’archevêque Carrillo quand il l’avait vu pour la première fois à Tolède où il l’avait confié, pour l’élever, à une pauvre famille d’ouvriers. Il n’avait jamais pu avoir de données exactes sur sa naissance. Inigo qui travaillait l’acier chez un armurier, ne parlait presque jamais et sa femme Juliana était une bavarde qui ne racontait guère que des mensonges. Il savait seulement que sa mère était une captive Mauresque et son père un savant étranger qui ne s’était arrêté que peu de jours à Almazan après être allé visiter l’archevêque de Tolède.

L’estime qu’il avait pour le père avait valu au fils