Aller au contenu

Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/192

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
190
LA LUXURE DE GRENADE

qu’apporta Fatima. Celle-ci riait pour déguiser son embarras et l’audace de sa demande. Pourquoi cet embarras ? La demande de celui qu’on aime n’est jamais audacieuse. Oui, elle sortirait du Generalife à l’heure dite, elle monterait dans la litière qui l’attendrait, elle irait retrouver Almazan.

Et la journée passa dans le brouillard d’un songe exquis. Fallait-il mettre des bijoux, resplendir comme un soleil ou y avait-il plus de grâce dans un mince cou nu et dans de minuscules mains ornées par la trace des bagues ôtées ? Était-il temps de verser dans sa chevelure quelques gouttes de cette suave odeur qu’elle avait composée elle-même et dont les effluves avaient une secrète correspondance avec le vert de ses yeux, la troisième note de la gamme et la force de la planète Vénus ? Autant de perplexités charmantes qui ne furent résolues qu’à la dernière minute, quand la nuit fut venue, quand une litière longea la muraille qui entourait les jardins du Generalife.

Une forme verte glissa dans un escalier de pierre, frôla des buis, courut le long d’un bassin, caressa des roses avec une main qui tremblait, arriva à une petite porte par laquelle personne ne passait jamais et où il n’y avait qu’un garde marocain auquel la forme verte fit un signe.

Le garde marocain ouvrit la porte, mais Khadidja revint sur ses pas.

Comment se faisait-il que le rossignol ne chantait pas ? Était-ce oubli ou désapprobation ? Et pourquoi les magnolias laissaient-ils tomber leurs branches fleuries comme les cierges éteints d’un chande-