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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/65

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LA LUXURE DE GRENADE

ment obscure. Almazan y fit quelques pas en tâtonnant, se demandant d’où pouvait venir un léger bruit d’eau qu’il entendait, un bruit intermittent de gouttelettes répandues.

— J’imite la secte des Baptes de Byblos, lui dit à l’oreille Aboulfedia. Je fais pratiquer d’abord la purification par l’eau.

Almazan sentit que la main qui l’attirait dans un angle de la pièce tremblait dans la sienne.

— Regarde, et retiens ton souffle.

Almazan faillit pousser un cri. Aboulfedia avait soulevé une tenture et, à travers une gaze d’or dont les mailles formaient des losanges, il voyait la chambre voisine qui était baignée d’une délicieuse lumière turquoise par une haute lampe de bronze. Les murs étaient recouverts de faïences bleuâtres et à droite et à gauche, il y avait des enfoncements recouverts de tapis multicolores amoncelés et de coussins. Le milieu de la pièce était une piscine circulaire où l’on descendait par trois marches.

Sur ces marches, Isabelle de Solis était couchée sur le ventre, entièrement nue. Ses petits seins s’écrasaient contre le marbre et c’était elle qui faisait le bruit d’eau irrégulier qu’Almazan avait entendu, car elle remplissait parfois le creux de sa main et elle en jetait négligemment le contenu dans l’air. Les gouttes, en retombant sur sa nuque et sur son dos, la recouvraient d’une pluie de perles scintillantes et lui causaient un long frisson qui la faisait tout à coup se tendre et se replier.

Tout près des marches était posée une orange ouverte.