Page:Maintenant - revue littéraire, 1912-1915.djvu/86

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plus en public. C’est une des raisons pourquoi je viens grossir le nombre des spectateurs qui se rendent au Salon des Indépendants ; bien que la meilleure soit encore le profond dégoût de la peinture que j’emporterai en sortant de l’exposition, et c’est un sentiment que le plus souvent on ne peut jamais assez développer. Mon Dieu, que les temps sont changés ! Aussi vrai que je suis rieur, je préfère le plus simplement du monde la photographie à l’art pictural et la lecture du Matin à celle de Racine. Pour vous, ceci demande une petite explication que je m’empresse de vous donner. Par exemple, il y a trois catégories de lecteurs de journaux : tout d’abord l’illettré, qui ne saurait prendre aucun goût à la lecture d’un chef-d’œuvre, puis l’homme supérieur, l’homme instruit, le monsieur distingué, sans imagination, qui lit à peine le journal parce qu’il a besoin de la fiction des autres, enfin l’homme ou la brute avec un tempérament qui sent son journal et qui se moque de la sensibilité des maîtres. Il y a de même trois sortes d’amoureux de photographies. Il faut absolument vous fourrez dans la tête que l’art est aux bourgeois et j’entends par bourgeois : un monsieur sans imagination. C’est entendu ; mais alors, me permettez-vous de demander pourquoi, méprisant la peinture, vous vous donnez la peine d’en faire la critique ?

C’est bien simple : si j’écris c’est pour faire enrager mes confrères ; pour faire parler de moi et tenter de me faire un nom. Avec un nom on réussit avec les femmes et dans les