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Page:Mairet - Marca.djvu/159

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le pas d’un homme. Ivan était à ses côtés avant qu’elle se fût doutée de sa présence.

— Vous ici, mademoiselle, seule et — triste.

Il s’arrêta très étonné. Il venait de faire une grande tournée, et portait un attirail de peintre sur le dos ; la poussière de la route couvrait ses vêtements ; il n’était certes pas le prince Charmant dont rêvent les têtes de dix-huit ans. Marca leva les yeux vers lui ; elle sentait que cet homme, qui lui semblait vieux, qui n’était pas beau, qui avait été malheureux, était tout fait pour le rôle de confident.

Elle lui dit, souriant à moitié :

— Je ne suis pas triste souvent, mais quand par hasard je le suis, il me semble que c’est toujours vous qui me consolez, et que vous seul avez ce droit : vous dont la jeunesse a été solitaire et dure.

— Ce n’est pas seulement une tristesse vague qui vous fait pleurer aujourd’hui, dit le peintre ; vous avez un chagrin réel, Marca.

— Oui, répondit-elle simplement, on m’a fait de la peine.

Il aurait voulu lui en demander plus, mais il n’osa pas. Il éprouvait une très grande sympathie pour cette jeune fille, qui n’appartenait en réalité à personne, qu’un caprice avait recueillie, qu’un caprice pouvait rejeter seule dans le monde. Il trouvait que Véra agissait fort à la légère en laissant croire