Page:Mairet - Marca.djvu/23

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de son péché mignon, la gourmandise, sanglée dans son corsage à faire pitié, et luttant avec énergie contre la somnolence qui la gagnait toujours après un trop bon dîner.

Véra, debout auprès d’une petite table, servait elle-même le café ; elle savait fort bien qu’on la critiquait, et elle en prenait son parti ; elle se sentait en beauté ce soir-là. Sa pâleur habituelle avait fait place à une légère teinte rosée qui lui seyait bien ; ses yeux, souvent un peu ternes, d’un bleu pâle, avaient pris une certaine vivacité. Ses beaux cheveux clairs, très légers et fins, qu’elle portait le plus simplement possible, ne suffisaient pas pour relever la correction un peu insignifiante de ses traits. Elle s’en rendait bien compte et son triomphe était ailleurs : elle portait une robe de velours noir, absolument simple, et décolletée autant qu’elle le pouvait être. Ses épaules modelées comme celles d’une statue grecque, sortaient, superbes, de ce noir mat el collant ; aucune dentelle ne venait estomper les contours du corsage ; le noir intense se plaquait au blanc lacté de la peau. Véra ne portait aucun bracelet ; un collier, appelé collier chien, lui serrait le cou de ses diamants monstres, qui ne laissaient presque pas voir de monture — c’était tout ; dans ses cheveux, rien. Elle était superbe ainsi, et elle ne l’ignorait pas ; elle aimait à passer auprès de sa