Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, IV.djvu/163

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comme on l’a dit au paragraphe du nettoiement des taillis, page 98.

Dans les terrains humides ou marécageux, on rencontre en outre quelques arbustes qui croissent spontanément, épuisent le sol, et forment, par leurs racines, des réseaux si serrés, que les semences ne peuvent y pénétrer. Tels sont le ledon des marais (ledum palustre, L.), l’andromède à feuilles de pouliot (andromeda poliifolia, L.), la bruyère quaternée (erica tetralix, L.), la camarine à fruits noirs (empetrum nigrum, L.), l’airelle veinée (vaccinium uliginosum, L.). On se délivre facilement de ces plantes, en desséchant le sol qui les porte.

Au nombre des monocotylédonées qui peuvent porter préjudice aux forêts, on range le scirpe des bois (scirpus silvaticus, L.), et les joncs ; parmi les graminées, plusieurs agrostis et elymes, le nard serré (nardus stricta, L.), et différentes laîches (carex). Ces plantes n’ont d’effet nuisible que quand elles poussent trop dru, que les racines s’entrelacent, se feutrent et empêchent le sol de recevoir les influences atmosphériques, quand elles s’opposent à la culture des bois, provoquent l’introduction des bestiaux, servent de retraite aux insectes ou à leurs larves, et étouffent les graines qui lèvent lentement.

Les cryptogames doivent également attirer l’attention du forestier. Les fougères s’étendent avec rapidité dans les endroits qui ne sont pas ombragés par les arbres, et empêchent tout repeuplement dans ces lieux ; il faut les extirper avant la maturité des semences. Les mousses couvrent, au contraire, le sol dans tous les lieux ombragés et humides ; quelques espèces, telles que les hypnum, entretiennent la fraîcheur du sol et la germination de plusieurs semences ; mais généralement les mousses, surtout celles du genre polytric, s’opposent à l’écoulement des eaux, empêchent les semences de parvenir sur le sol, donnent retraite aux insectes et servent à faire naître ou à propager les incendies dans les forêts. On s’en débarrasse en labourant le sol au printemps ou en été. Celles qui s’attachent au tronc des arbres empêchent aussi la transpiration et entretiennent l’humidité. On doit autant que possible les faire disparaître. Les lichens viennent sur le sol ou sur les arbres ; ces derniers sont les plus nuisibles ; ils s’opposent aussi à la transpiration et à l’absorption du végétal, entretiennent sur le tronc une humidité constante longtemps après les pluies, servent de refuge à une foule d’insectes, et nuisent à la croissance des arbres ; autant que possible, il faut en délivrer ceux-ci le plus fréquemment possible. Les champignons apparaissent sur les racines des plantes qu’ils font périr, ou bien s’attachent au tronc ou aux branches des arbres, et causent la pourriture du bois, ou enfin se montrent sur les feuilles, et n’ont pas alors d’effet bien marqué sur la vie des grands végétaux.

La destruction des champignons a peu d’effet sur les arbres ; ce sont les causes de l’existence de ces parasites qu’on doit rechercher. Ces causes sont dues à quelques perturbations dans les fonctions vitales des végétaux ; il faut combattre ces maladies par des soins ou par un autre mode de culture ou d’aménagement.

Section iv. — Phénomènes physiques nuisibles aux forêts.

Les phénomènes physiques qui peuvent nuire à nos forêts sont dus, les uns au climat, d’autres à la nature et à l’état du sol ou à sa configuration topographique. Nous allons examiner dans des paragraphes particuliers l’influence de ces deux causes.

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§ier. — Phénomènes naturels dus aux climats.

Les phénomènes naturels dus au climat ou atmosphériques, sont le froid, la chaleur, le vent, la neige, le givre et le verglas, et enfin la grêle et la foudre. Le forestier doit d’autant plus chercher à garantir les bois contre leur influence, qu’indépendamment des dégâts qu’ils causent, ce sont eux qui la plupart du temps donnent naissance aux maladies des arbres que nous avons fait connaître plus haut.

1o Le froid est en général nuisible à un assez grand nombre de végétaux de nos forêts, qu’il fait souvent périr ou dont il arrête le développement. C’est surtout par les gelées auxquelles il donne lieu, que ce phénomène atmosphérique cause le plus de dommages à nos bois. Les gelées produisent des effets d’autant plus funestes pour les arbres, qu’elles succèdent tout-à-coup à un dégel, à de fortes pluies, à une fonte de neige ; dans ce cas, toutes les parties des végétaux, imbibées d’eau, distendues et rompues lorsque celle-ci vient à se glacer, sont complètement désorganisées. Les fortes gelées fendent et éclatent les gros arbres de nos forêts, et produisent les défauts connus sous le nom de gelivures, cadranures, faux-aubier, etc. (Voy. p. 114). Les gelées de printemps endommagent souvent beaucoup les bourgeons des taillis, surtout si le soleil luit de bon matin et fait fondre la glace par la chaleur de ses rayons.

On garantit les forêts des effets du froid et de la gelée, ou du moins on atténue leurs effets désastreux par un aménagement raisonné et habilement dirigé. De plus, pour parvenir à ce but, on conserve et on entretient avec soin les lisières des bois (p. 96), on forme des rideaux de grands arbres du côté où les vents froids soufflent le plus constamment, ou bien du côté où s’élèvent des vapeurs aqueuses. On donne un écoulement aux eaux qui séjournent à la surface du terrain ou dans les sols humides, et on ménage des courans assez vifs d’air dans ceux qu’on ne peut assécher complètement. Quant aux semis, aux jeunes plants et aux cépées, on les abrite en réservant dans les coupes un certain nombre de vieux arbres convenablement espacés qui les protègent contre le froid ; on les couvre avec des feuilles mortes, de la mousse, des joncs ou des ramilles ; ou les abrite pendant quelque temps avec des plantes qui poussent avec rapidité, et procurent promptement le couvert que les autres réclament ; on foule la terre pour que le froid la pénètre moins ; on fait choix des essences qui supportent aise-