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liv. v.
AGRICULTURE FORESTIÈRE : DE L’ESTIMATION DES FORÊTS.


aurons la progression décroissante qui va suivre.

Solidité de l’arbre en grume 
Pieds cubes. cent.
238 73
Solidité de la pièce d’écarrissage, au quart sans déduction 
187 50
— Au 12e de déduction 
157 55
— Au 6e de déduction 
130 21
— Enfin, au 5e de déduction 
120 00

La première de ces quantités exprime la solidité totale de l’arbre rond ; la dernière représente la solidité du même arbre après l’écarrissage à vives-arêtes, c’est-à-dire sur quatre faces régulières et égales ; les 3 quantités intermédiaires expriment des solidités fictives qui correspondent à des états d’écarrissage incomplets, mais plus ou moins avancés.

Ainsi l’arbre, qui, avant d’avoir subi aucune modification, contient réellement 238 pieds cubes et une fraction, n’est admis dans le commerce que pour une solidité de convention, qui décroît selon les lieux, jusqu’au terme de 120 pieds cubes, c’est-à-dire jusqu’à la moitié, à très-peu près, de la solidité naturelle de l’arbre.

Par une conséquence nécessaire, la valeur du pied cube augmente dans une progression inverse. Supposons que le pied cube au 5e de déduction ait une valeur de 10 francs, et qu’on veuille savoir combien vaudrait le pied cube correspondant à chacun des autres modes de cubage, nous trouverons ces valeurs par des règles de trois, dont nous n’énoncerons que la première :

Le pied cube au 5e est au pied cube au 6e comme 130,21 est à 120,00.

En effectuant les diverses proportions, on trouve la suite croissante ci-après :

Valeur du pied cube de l’arbre en grume 
fr. c.
5 02
— Du pied cube, au quart sans déduction 
6 40
— Du pied cube, au 12e de déduction 
7 62
— Du pied cube, au 6e de déduction 
9 21
— Du pied cube, au 5e de déduction 
10 00

De même que nous avons vu décroître les solidités, nous voyons ici les valeurs du pied cube augmenter dans une progression absolument contraire ; si le pied cube de bois en grume vaut 5 fr. 02 c., le même volume en bois écarri à vive-arête vaudra 10 fr., c’est-à-dire le double du premier prix.

Les divers modes de cubage sont donc indifferens malgré la grande inégalité de leurs résultats, puisque la valeur vénale de l’unité de mesure varie comme ces résultats. Toutefois le cubage au 5e paraît devoir être préféré par deux considérations : la première, c’est qu’il exprime un état réel de l’arbre, l’écarrissage complet sur 4 faces, et la seconde, c’est que la solidité qui en dérive forme, à une très-petite fraction près, la moitié de celle de l’arbre en grume, en sorte que, l’une étant connue, l’autre l’est également.

Ainsi une table calculée au 5e de déduction donnerait d’abord le cubage de la pièce écarrie, et par suite le cubage de l’arbre en grume, au moyen de la duplication du chiffre puisé dans la table.

La pratique de la cubature des arbres sur pied présente 2 difficultés ; l’une est relative au mesurage de la hauteur des arbres, et l’autre au mesurage de leur circonférence moyenne.

Hauteur. Pour mesurer la hauteur des arbres, il faut que le forestier cherche à acquérir l’expérience du coup-d’œil par de fréquens exercices et par des vérifications faites après l’abattage. Toutes les méthodes empruntées à la science sont d’un faible secours, tant à cause de la lenteur de leur application qu’à cause du défaut d’espace dans les forêts. Un moyen mécanique très-simple, indiqué par Duhamel, consiste à appliquer contre l’arbre une règle ou une perche d’une longueur connue, et à apprécier combien de fois cette mesure peut être contenue dans la hauteur de l’arbre ; ou, pour plus de précision, on peut se servir de baguettes de 3 pieds de longueur, qui s’emboîtent les unes au bout des autres, et dont on ajuste ainsi le nombre convenable pour atteindre à la sommité de la tige. Enfin, on peut faire usage pour le même objet, de l’instrument qui a été décrit page 109 de ce livre. Ce dernier moyen est commode, et procure des résultats d’une justesse parfaite.

Circonférence. Lorsque l’arbre est abattu, rien de plus facile que de mesurer son pourtour au milieu de sa longueur ; mais, lorsque l’arbre est debout, le milieu de la tige n’est appréciable que pour l’œil de l’estimateur ; et à moins d’une grande habitude, on n’obtient par ce moyen que des évaluations fautives, ou au moins douteuses. Frappé de cet inconvénient, nous avons cherché à déduire la grosseur moyenne d’une mesure réelle, prise à une hauteur facilement accessible, comme 4 pieds à partir du sol.

Des observations multipliées nous ayant appris qu’il existe un rapport constant, ou à très-peu près constant, entre la circonférence d’un arbre, mesurée au milieu de sa hauteur, et sa circonférence mesurée à 4 pieds du sol, nous avons calculé, sur ce rapport, une table de cubage au 5e de déduction : cette table, insérée dans notre Manuel de l’estimateur des forêts[1], a l’avantage de substituer à une estimation visuelle, et par conséquent peu sûre, un mesurage effectif et certain. Le rapport sur lequel repose l’économie de ce tarif, est à peu près 9/10e. Ce chiffre offre un moyen bien simple pour déterminer la circonférence moyenne et le côté d’écarrissage d’un arbre sur pied, dont on a mesuré la grosseur à 4 pieds du sol ; on sait, par exemple, que le pourtour d’un arbre, à 4 pieds de terre, est de 90 pouces ; on trouve aussitôt que la grosseur, au milieu de la tige, est de 90 moins 9, ou 81 pouces. Et, prenant le 5e de ce dernier nombre, on a 16 pouces pour le côté de la pièce de charpente. Toutefois, nous n’insérerons ici, ni la table de cubage qui nous est propre, ni aucune autre, parce que nous devons admettre également les différentes méthodes en usage pour parvenir à la détermination des solidités ; d’un autre côté il existe partout des tables de ce genre. Loin d’en exclure aucune, nous donnerons un moyen pour apprécier les rapports qui les lient les unes aux autres.

  1. Chez Mme  Huzard, à Paris.