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Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, IV.djvu/82

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livre viii.
AGRICULTURE FORESTIÈRE : PLANTATION DES FORETS.


peu près également mêlées d’épicéas, il faudra leur appliquer le mode d’aménagement indiqué pour ces derniers. Mais, vu les propriétés diverses de chacune de ces espèces d’arbres, et les différentes qualités de leurs graines, inégales en pesanteur et en durée, il faut les traiter suivant la méthode indiquée pour les pins, d’après laquelle on ne doit pas faire de coupes à blanc-étoc, et prendre successivement le bois dont on a besoin dans un canton déterminé, mais en en favorisant le repeuplement.

Le repeuplement des forêts de mélèzes sera au contraire soumis aux principes indiqués pour celui des forêts d’épicéas.

Section ii. — Forets artificielles.

Les forets artificielles proviennent de semis ou de plantations faits par la main des hommes.

Les endroits qui sont privés de la ressource des ensemencemens naturels, ainsi que tous les terrains vides destinés à la culture des bois, rentrent dans le domaine de l’art, auquel il appartient de les peupler. Cet art forme le premier et principal objet de la science forestière. Ses moyens sont : 1° les semis ; 2° les plantations.

Art. ier. — Des semis.

Les semis artificiels ont pour objet de remplacer les arbres à semences. Ces semis auront un succès aussi heureux et plus uniforme que les ensemencemens naturels, s’ils sont bien dirigés. Les méthodes les plus simples et les moins coûteuses sont, dans tous les cas, les plus sûres, si elles imitent la marche de la nature et sont employées avec la prudence convenable. Ainsi, pour les semis artificiels, on doit s’occuper principalement : 1° de choisir les essences convenables ; 2° de s’assurer de la bonté des semences ; 3° de s’en procurer une quantité suffisante ; 4° de choisir et préparer convenablement le terrain ; 5° de saisir le temps propre aux ensemencemens ; 6° d’enterrer la semence de manière à ce qu’elle ne soit ni trop ni trop peu recouverte ; 7° enfin, d’examiner si l’entreprise doit se faire en grand ou en petit.

§ 1er. — Choix des essences.

Les semis en grand doivent toujours se faire avec des espèces de bois dont le mérite est reconnu dans l’économie forestière, et qui conviennent le plus aux besoins du pays et à la nature du terrain. Il serait contre toute raison d’infester les forêts des essences les moins utiles, et de négliger celles qui ont toujours eu ou qui promettent un succès et des avantages assurés. Les bois résineux seront confiés aux sols légers, sablonneux, couverts de bruyère, en ayant égard à la distinction qui doit être faite entre les pins proprement dits, les sapins, les épicéas, les mélèzes, et entre les résineux indigènes et les résineux exotiques. Le pin du lord, par exemple, s’élève dans les terrains bas, frais et profonds de l’Amérique septentrionale, et le Pinus pungens croit sur des plateaux secs et élevés. Il faut au mélèze une atmosphère humide et une température fraîche qu’on lui procure en l’élevant d’autant plus au-dessus du niveau de la mer. Comme il retrouve l’une et l’autre dans les lieux bas et très-humides, marécageux même, l’expérience a prouvé qu’il s’accommodait très-bien de cette sorte d’exposition. Il ne faut pas un aussi bon fonds aux arbres à racines traçantes et superficielles, qu’à ceux dont les racines pivotantes et perpendiculaires vont chercher la nourriture à une grande profondeur. Il faut placer à l’abri des vents violens qui régnent au bord de la mer et désolent certaines contrées, les arbres dont la cime branchue et le feuillage épais donnent trop de prise à leur action. Les bois propres au chauffage auront toujours l’emploi de leurs produits assuré dans les pays de minerai et de hauts fourneaux, et à la portée de diverses usines dont les produits se traitent parle feu, comme les verreries. Les bois blancs, donnant de la volige, seront employés aux emballages de ces établissemens, et, portés près des rivières et des canaux, ils pourront arriver sans trop de frais vers les points où la consommation en sera assurée. Les bois qui donnent des cercles et des échalas seront d’un revenu certain dans les pays de vignobles. Les pins donnant de la mâture, des pièces propres aux constructions navales, et des produits résineux, à la portée des ports de mer, offriront une source de richesse à des contrées frappées d’une stérilité immémoriale.

§ II. — Bonté des semences.

Le succès de tout semis dépend essentiellement de la bonté des semences ; il y a 3 conditions principales pour qu’une graine soit bonne et propre à germer.

La 1re est d’avoir pris complètement sa forme sur la mère plante, et d’avoir reçu, par une fructification convenable, un germe fertile. Chaque graine, bien mûre et bien formée, doit avoir 3 pièces essentielles, savoir : une enveloppe extérieure et une intérieure, une amande, et un germe qui est le rudiment de la plante future.

La 2e condition est d’être parvenue à un degré convenable de maturité. La maturité se reconnaît lorsque le fruit, la capsule ou le cône qui la renferme a acquis tout son développement ; qu’elle contient elle-même et à l’état sain les parties huileuses et farineuses qui lui sont propres ; que l’amande en est bien formée et de la couleur et odeur qui lui sont propres ; et, pour la plupart des bois,lorsque cette semence se détache naturellement de l’arbre.

La 3e condition dépend d’une bonne méthode de récolte et de conservation.

De la récolte. — Les semences doivent être récoltées fraîches et mûres, et être à l’instant étendues spacieusement dans des endroits aérés, où on les remue souvent pour les faire sécher, leur donner un dernier degré de maturité, et empêcher par là qu’elles ne s’échauffent et ne se corrompent, — On doit avoir recours à ces moyens, soit que la graine doive être semée tout de suite, soit qu’elle doive être conservée.

Dans ce dernier cas, la conservation, cha-