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livre viii.
HORTICULTURE.


est, par le nombre, la variété et les qualités précieuses de ses fruits, le premier d’entre nos arbres fruitiers à pépins. Avant de nous occuper des moyens d’en obtenir par la taille des récoltes régulières, abondantes et durables, nous devons étudier son mode particulier de végétation.

Fig. 265

Toute branche de poirier se termine par un œil à bois ; cet œil s’ouvre au printemps pour former un rameau semblable en tout à celui qui l’a porté ; la branche, livrée à elle-même, continue à croître ainsi par son extrémité supérieure. Tous les yeux des pousses de chaque année sont à bois sans exception. Suivons sur un rameau de trois ans (fig. 265) la destinée de ces yeux, en commençant par les derniers. Les traits AA divisent la branche en trois sections, 1, 2, 3, dont chacune représente le produit d’une année de végétation. Les yeux de la troisième section n’ont subi que des modifications peu apparentes dans le cours annuel de la végétation ; quelle que soit leur destinée ultérieure, ils ne représentent pour le moment que des yeux à bois. Ceux de la deuxième section sont plus sensiblement modifiés ; nous n’en voyons cependant pas un qui soit devenu bouton à fruit ; quelques-uns seulement sont en train de le devenir, transformation très lente chez le poirier. De plus, nous remarquons vers le haut de la seconde section plusieurs productions BBB, en tout semblables à la première section, sauf les dimensions ; ce sont des yeux à bois qui se sont ouverts en bourgeons ; ils sont situés immédiatement au-dessous de l’origine de la troisième section ; ils suivaient avant son développement l’œil terminal, duquel cette section est sortie. Au-dessous de ces bourgeons, nous trouvons, sur la deuxième section, des yeux plus avancés vers l’état fertile ; plus bas, la place des yeux inférieurs est à peine visible ; ils ne se sont point ouverts ; ils existent cependant, mais dans un état de sommeil végétal ; la sève, attirée trop puissamment par les bourgeons situés au-dessus d’eux, a passé à côté d’eux sans qu’ils aient pu en profiter. Les derniers, placés tout près du talon, sont tout-à-fait oblitérés. Ceux de la première section ont suivi exactement la même marche, seulement, comme ils ont végété un an de plus, les bourgeons sont plus forts et peuvent avoir déjà eux-mêmes des bourgeons développés ; les yeux fertiles sont plus avancés vers le moment où ils porteront leurs premières fleurs, bien que ce moment ne soit point encore venu. Enfin le bas de la branche est complètement nu ; on n’y distingue aucun des yeux inférieurs, qui, lorsque cette section était encore à l’état de bourgeon, se voyaient aussi apparents que ceux dont est garnie la troisième section dans toute sa longueur. Tels sont les faits qui s’offrent à nous au premier aspect. Un examen plus attentif nous fera reconnaître, à côté de tout œil à bois ou à fruit, un sous-œil, souvent très peu distinct, mais très vivace, et qui devient un bourgeon vigoureux en fort peu de temps, lorsque son compagnon vient à périr ou à être retranché. Cette ressource précieuse d’un sous-œil dormant, qu’on peut toujours éveiller à volonté, n’existe que dans les arbres à fruits à pépins. Ces arbres ont encore une autre ressource ; les yeux du talon ne sont oblitérés qu’en apparence ; ils sont toujours prêts à percer l’écorce. On peut toujours compter sur eux lorsque, par une taille courte, on force la sève à se porter de leur côté.

Après avoir vérifié cette marche constante de la végétation du poirier, nous sommes en état déjuger en quoi elle contrarie nos vues dirigées vers la production du fruit, et nous pouvons entrevoir par quels moyens il nous sera facile de favoriser le développement des productions fruitières ; nous n’en voyons encore aucune bien formée sur la branche que nous venons d’étudier (fig. 265) ; cette branche est trop jeune.

§ II. — Productions fruitières.

Fig. 268, 270.

Fig. 266, 267, 269.

Les boutons à fruit mettent souvent plus de quatre ans à passer de l’état de boutons à bois à celui de production fruitière. La fig. 266 représente un bouton à fruit parvenu à sa perfection et prêt à s’ouvrir. Les rides de son support sont les traces laissées par les pétioles des feuilles qui l’ont protégé pendant le cours de son existence, et sans lesquelles il n’aurait pu attirer la sève nécessaire à son accroissement. Tout œil à bois, quelle que soit sa place sur le poirier, peut, dans des circonstances données, devenir un bouton à fruit ; s’il n’est point oblitéré comme ceux du bas des rameaux, s’il ne s’ouvre point en bourgeon