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titre iii.
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PÉPINIÈRES, PRINCIPES GÉNÉRAUX.


d’autres dans les pépinières d’arbres à fruit.

Nous devons faire observer que pas une de ces greffes n’est intrinsèquement la meilleure pour l’objet auquel on l’applique. Pour greffer en écusson à œil poussant et à œil dormant, les greffes Lenormand et Vitry sont inférieures sous tous les rapports au procédé de la greffe Aristote, plus facile à exécuter, en même temps qu’il est aussi plus sûr et plus solide, puisqu’il ne risque pas d’endommager l’aubier du sujet ; il n’a contre lui que d’être trop ancien et trop peu répandu ; les diverses greffes en fente seraient remplacées avec avantage par la greffe par copulation, qui met en contact de plus grandes surfaces susceptibles de soudure ; la greffe Jefferson vaut mieux que la greffe en flûte ordinaire et répond aux mêmes usages ; il y aurait aussi lieu, dans bien des cas, de lui substituer avec avantage la greffe herbacée à la Tschudy. Beaucoup d’horticulteurs partagent à ce sujet notre conviction ; mais, dans les pépinières, la coutume l’emporte ; les ouvriers tiennent trop aux anciens procédés, et ils ont trop de moyens de faire échouer les nouveaux. Nous avons néanmoins à signaler une importante innovation récemment introduite dans l’art de greffer, et déjà généralement en usage dans les pépinières de nos départements du midi ; c’est la greffe au coin du feu ou sur les genoux, qui ne constitue point un procédé à part, mais une application meilleure des procédés de greffe en fente, en écusson et par copulation. Il est évident qu’on opère mieux étant assis à son aise au coin de son feu, ayant près de soi sur une table les sujets, les greffes et les instruments nécessaires, que quand il faut greffer dehors, à genoux sur la terre humide, exposé au vent ou à la pluie. Voici ce qu’écrivait à ce sujet il y a quelques’ années, M. Van Mons.de Louvain, connu pour avoir peu d’égaux en Europe pour la culture des arbres à fruits :

« Le chancre du bout des branches et le cancer de la tige qui attaquent si fréquemment le poirier et le pommier greffés, surtout lorsque sur l’arbre en sève on exerce une taille de rapprochement, d’amputation ou d’abaissement, dépendent en grande partie de ce qu’on pose leur greffe sur des sujets en sève ou prêts à entrer en sève, et que l’opération oblige de rabattre tout près du sol ; le sujet acquiert une concentration de vie, et la vie de la greffe est suspendue ; on sent aisément ce que cette différence de condition peut produire.»

« La greffe du poirier sur franc et celle du pommier sur paradis doivent être exécutées sur des sujets levés de terre ; on opère sur ses genoux. Le poirier est greffé par copulation, le pommier est greffe en fente ; on rabat le sujet jusqu’à 0m,05 au-dessus de la naissance des racines. Les sujets doivent avoir été levés de terre et mis en jauge avant la saison des gelées. On peut commencer à greffer dès la suspension des gelées, et continuer jusqu’en mai. A moins d’accident, aucune greffe ne manque à la reprise, et la consolidation est si prompte que bientôt les traces de la plaie disparaissent. Le bien consiste en ce que l’état de souffrance est commun aux deux parties ; la vie végétale est suspendue dans le sujet comme dans la greffe ; si le sujet est sans branches, il est aussi, à peu de choses près, sans racines ; pour faire développer les yeux de la greffe, des racines courtes se mettent plus tôt à pousser que des racines longues ; un fort appareil de racines n’est pas mis hors d’équilibre avec un appareil nul de branches ; enfin, les deux parties se relèvent ensemble de leur langueur commune, et le sujet n’envoie pas à la greffe plus de sève que celle-ci n’en peut assimiler. Une fois reprise, la greffe marche plus rapidement qu’une autre ; elle subdivise son bois en raison de ce qu’elle pousse de courtes et nombreuses racines, et bien souvent, au bout de l’année, on a un arbre fait qui, l’année suivante ou la seconde année, porte déjà fruit.»

§ IX. — Résumé.

Avant de clore ce chapitre, résumons les principes généraux qui doivent présider à la création d’une pépinière.

Emplacement. — Le plus convenable est une plaine légèrement inclinée, à l’abri des vents violents de l’ouest et du nord ; tout local peut être rendu propre à l’établissement d’une pépinière, au moyen des brise-vents ou abris artificiels.

Qualité du sol. — Le sol doit être un peu moins fertile que celui où les arbres seront plantés à demeure. Le pépiniériste ne pouvant savoir d’avance où ses arbres iront quand il les vendra, ne doit pas préférer le sol le plus riche possible ; s’il en a de plusieurs qualités, il doit, à l’époque des ventes, avoir égard à ces différences, par rapport au sol dont disposent les acheteurs.

Fig. 219, 217.

Fig. 218.

Semis. — Ils doivent toujours être, préférablement à tout autre moyen, la base du repeuplement de la pépinière, pour obtenir des variétés nouvelles, régénérer les anciennes, ou seulement pour se procurer des sujets toujours meilleurs que ceux qu’on obtient par marcotte. Il vaut mieux semer en lignes qu’à la volée, à moins que, comme dans le Romois, on ne doive ensemencer en pépins de très grands espaces. Le sol, surtout s’il est léger, doit être raffermi par-dessus les semis au moyen d’un rouleau, ou mieux d’une planche qui per-