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chap. 6e
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Des charrues.

Ce moyen serait également applicable, avec quelques modifications, à la charrue Grangé, pour la rendre propre à labourer en allant et en revenant dans la même raie.

M. Dessaux de Courset a adapté à une charrue modifiée par lui, un double versoir qui paraît fort ingénieux. Voici, à défaut de renseignemens qui nous soient personnels, ceux que nous procure l’Annotateur de Boulogne-sur-Mer : « Figurez-vous deux plaques de fer ou oreillons légèrement recourbés, placés sur le soc de manière à former par leur rencontre un angle dont le sommet est vers la pointe du soc, et qui est traversé par un boulon de fer partant de la haye au sep, et sur lequel tournent ces deux plaques, réunies par cette extrémité et écartées par l’autre au moyen d’une verge de fer recourbée en crochet. L’effet de la mobilité de ce double versoir sur le boulon de fer formant son axe vertical, consiste à pouvoir, au moyen d’un taquet de bois, faire saillir tantôt l’oreillon ou versoir de droite, tantôt oreillon ou versoir de gauche, ou de pouvoir, au moyen de deux taquets moins larges, placés de chaque côté du support du soc, maintenir les deux oreillons ou versoirs dans une demi-saillie. Il résulte de ces dispositions du double versoir que, lorsque les deux ailes sont maintenues égales et peu saillantes de chaque côté, la charrue fait fonction de binot. Si au contraire un des oreillons est disposé pour saillir exclusivement, il fait l’effet du versoir de la charrue ordinaire. »

Fig. 252

Enfin, M. Rosé a trouvé tout récemment le moyen d’entraîner de droite à gauche et de gauche à droite, selon la direction du labour, une pièce mobile A (fig. 252), qui sert à la fois de soc, de coutre et de versoir. La nouvelle araire Rosé à tourne-soc-oreille avec petit avant-train sous l’age, peut donc être considérée, comme le complément des diverses améliorations dont nous venons de parler. — A, tourne-soc oreille en fer battu, aciéré sur la pointe et les deux tranchans, qui servent alternativement de soc et de coutre.

Ajoutons encore, par anticipation, ce que nous aurons bientôt à dire en traitant des bisocs, que M.de Dombasle a inventé une charrue jumelle, propre à labourer alternativement à droite et à gauche, et que M. de Valcourt, notre collaborateur, en a inventé une autre, dite dos-à-dos, dont nous donnerons une description détaillée, et que nous regardons comme la meilleure jusqu’à présent connue, pour remplacer la charrue tourne-oreille, principalement sur les coteaux, pour les labours profonds et dans les terrains qui offrent de la résistance. — Elle a été adoptée à Grignon et à Roville.

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§ iv. — Des charrues à deux versoirs.

Les charrues à deux versoirs ou plutôt à deux épaules ou oreillons (car nous ne devons pas nous occuper ici de celles qui, sous le nom de cultivateurs, bineurs, etc., sont employées exclusivement aux labours d’entretien des cultures) sont utilisées dans l’Ouest et dans diverses autres parties de la France et de l’Europe, à peu près exclusivement, pour donner la dernière façon aux terres disposées en billons, et pour recouvrir les semis sous raies.

Leur soc, en fer de lance, est fixé sur le sep au moyen d’une douille qui l’embrasse à frottement ; il a ordinairement, de l’extrémité postérieure d’une aile à l’autre, un peu plus de largeur que le talon du sep, de manière à rendre plus facile la marche de ce dernier ; — les deux planchettes qui forment les épaules sont légèrement envoilées du haut pour mieux renverser la terre. — Quand on ajoute un coutre, ce qui a rarement lieu, pour le retenir, on lui adapte une bande plate de fer ou coutriau, terminée inférieurement par un crochet qui entre dans un trou pratiqué vers le milieu du soc, et qui est percée de trous à son autre extrémité, de manière à pouvoir être fixée au-dessus de l’age, qu’elle traverse, par une cheville ou un simple clou. — Le reste de ces sortes de charrues n’offre aucune particularité remarquable.

Ce qui les caractérise dans la pratique, c’est que, selon qu’on les dirige horizontalement, ou qu’on les incline à droite ou à gauche, on rejette la terre, dans le premier cas, également des deux côtés, et dans le second, en entier du côté de l’inclinaison, de sorte qu’on peut obtenir alternativement avec un de ces instrumens, le travail du buttoir et de la charrue tourne-oreille.

Partout où l’on emploie en France les charrues à épaules, ce n’est, avons-nous dit, que pour les derniers labours et pour les semis sous raies. Là se borne en effet leur véritable mérite ; car, quoique, lorsqu’elles sont convenablement construites, elles divisent assez bien le sol et arrachent complètement les