Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, II.djvu/382

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est très coûteux, il a encore contre lui, de ne pouvoir résister longtemps aux frottemens de la marche, parce que l’usure de ses charnières a bientôt déterminé la désunion de ses pièces qui, vacillantes alors sous le sabot, rendent la progression difficile et gênée. Le fer formé de deux pièces articulées (fig. 236) en pince, qui n’est qu’une modification plus simple de ce dernier, en réunit à peu près tous les inconvéniens, sans offrir comme lui l’avantage de laisser au sabot son élasticité tout entière. Aussi est-il, à plus forte raison encore, inadmissible.

Enfin, après Bracy-Clarck, sont venus d’autres auteurs qui, frappés tout à la fois des inconvéniens de la ferrure ordinaire et de l’inefficacité des moyens proposés pour la remplacer, ont tranché la question, en disant que toute espèce de procédé employé pour la conservation des pieds des animaux, était inutile, ou du moins ne devait pas être considéré comme nécessaire, puisque la nature n’avait pas fait naître les chevaux avec des fers sous les pieds : étrange argument et qui conduit nécessairement à cette conclusion que l’homme n’a besoin ni de se vêtir ni de se chausser, puisqu’il est né sans vêtemens ni chaussures. Mais sans nous servir ici de la démonstration par l’absurde, il est facile de prouver que cet argument est sans nulle valeur ; et en effet, dans l’étal de nature la résistance de l’enveloppe cornée du pied se trouve parfaitement en rapport avec la résistance du sol considéré dans son étal naturel : or, il est évident que si le sol vient à acquérir artificiellement une plus grande dureté, il faut, pour que le rapport entre lui et le pied reste naturel, qu’artificiellement aussi le sabot acquière une plus grande résistance. Tel est le résultat que produit la ferrure, qui n’est en définitive que la conséquence nécessaire du pavage de nos routes et des rues de nos villes.

En dernière conclusion, il résulte de ce qui précède, que, de tous les procédés proposés pour la conservation des pieds, la ferrure dont nous avons enseigné les principes, est le seul admissible, malgré ses nombreux inconvéniens, que la stricte observation des règles peut, du reste, de beaucoup diminuer.

Avant de terminer cet article, je dois indiquer les sources ou j’ai puisé. Sa rédaction seule m’appartient complètement. Les idées m’en ont été données par mon père ou par les notes recueillies aux leçons que professe à l’école d’Alfort M. Renault, l’un des collaborateurs de cet ouvrage. Les dessins sont dus à l’habile crayon de M. A. Maignet, vétérinaire.



Chapitre VII. — Économie du bétail.

L’économie du bétail est cette partie de la science agricole qui comprend la multiplication, l’élève, l’entretien et l’emploi des animaux domestiques utiles à l’agriculture.

Les principes de l’économie du bétail sont généraux, c’est-à-dire applicables à tous les genres de bestiaux, ou ils sont spéciaux à chaque genre.

Les premiers sont déduits des lois générales de la vie des animaux ; les seconds indiquent l’application de ces règles générales à chaque genre de bétail, selon sa nature particulière et les circonstances dans lesquelles nous le plaçons.

Les notions générales comprendront l’hygiène, la multiplication et l’élève des animaux domestiques.

On élève et l’on tient du bétail dans l’industrie agricole : 1° pour l’exécution des travaux que nécessite la culture des terres ; 2° pour la production de certains articles nécessaires à l’homme, tels que le lait et les produits qu’on en obtient, la chair, la graisse, la laine, la peau, etc. ; 3° enfin pour la production du fumier. Ce dernier motif est, dans l’état actuel de l’agriculture en Europe, le plus important de tous. La tenue du bétail peut être indépendante de l’agriculture ; cette dernière, à l’exception de la petite culture jardinière des environs des villes, ne peut l’être du bétail ; de là cet axiome : Sans bétail point d’agriculture, auquel on pourrait ajouter celui-ci : Sans un nombreux bétail, point d’agriculture lucrative.

Quelque minime que soit le gain direct que donne le bétail, on voit toujours que les cultivateurs qui en tiennent le plus font les meilleures affaires ; partout où des vues courtes et un intérêt mal calculé ont poussé les cultivateurs à se restreindre au bétail qui leur était indispensable pour les travaux de culture et l’usage de la maison, l’épuisement du sol n’a pas lardé à diminuer la fortune des exploitans. Du reste, le bénéfice qu’on retire du bétail, de même que celui de la culture entière, croit en raison de l’extension que l’on donne à cette branche : il dépend en outre du choix et de l’emploi convenables des animaux, et enfin principalement du traitement et du régime auxquels on les soumet. Il est donc important que le cultivateur connaisse la nature des animaux domestiques et les conditions nécessaires à leur réussite. Les principes qu’on en déduit constituent l’hygiène des animaux domestiques.