Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, III.djvu/159

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feuille du mûrier est de mauvaise qualité, non appropriée à l’âge de l’insecte, qu’elle est rare et

CHAP.7e MALADIE DES VERS À SOIE 145 donnée en petite quantité, ou que dans une saison pluvieuse on la lui distribue non séchée et encore tout empreinte d’humidité ; — enfin, surtout, lor- sque, parvenus au 5e âge, la transpiration trachéale et cutanée, les fonctions de la digestion ou de la nutrition sont troublées par une cause fortuite ou par la négligence dans les soins journaliers, ou un écart de régime, etc. L’organisation, tant anatomique que physio- logique, du ver à soie a encore été trop peu étudiée pour qu’on puisse, avec quelque certitude, assigner les véritables causes, le siège, la marche et le trait- ement des maladies qui l’attaquent pendant sa vie. Ces affections, d’ailleurs, paraissent ne pas être les mêmes dans tous les climats, ou au moins ne pas y offrir les mêmes symptômes, et les observateurs ont mis si peu de soin dans l’étude de leur diagnostique, et leur ont même assigné des noms si arbitraires, qui varient avec le pays, qu’il est quelquefois diffi- cile de débrouiller le chaos de toutes celles qui ont été reconnues jusqu’ici. Nous allons toutefois faire connaître celles qui se présentent le plus fréquem- ment, en prenant pour guide les auteurs français et surtout les écrivains italiens qui ont étudié avec soin les affections pathologiques du ver à soie. 1° La muscardine, appelée aussi la rouge (male del segno, calcinaccio, calcino des Italiens). C’est une affec- tion très grave qui attaque le ver à tous les âges, souvent après qu’il a formé son cocon, lorsqu’il va se transformer en chrysalide, et même après cette transformation. Dans les 4 premiers âges, on ne remarque guère que quelques individus isolés qui en sont atteints, mais vers la fin du 5e la maladie attaque parfois un très grand nombre de vers et fait les plus grands ravages dans les magnaneries. On a longtemps disputé sur la nature de cette mal- adie, et on a fait à ce sujet, en Italie, de nombreuses expériences. Il paraît à peu près démontré aujo- urd’hui qu’elle n’est pas épidémique, mais contag- ieuse, et que la contagion se propage uniquement par le cadavre ; c’est-à-dire que la maladie se trans- met d’un individu à un ou plusieurs autres par le contact médiat ou immédiat du cadavre des indivi- dus morts de la muscardine. Ce qui rend indispen- sable la désinfection complète de l’atelier ou elle a régné, ainsi que celle de tous les ustensiles, avant d’entreprendre une autre éducation. Les caractères de cette maladie sont les suivants ; on voit d’abord paraître sur le corps des vers de petites taches pétéchiales, d’un rouge vineux, qui grandissent peu à peu, deviennent confluentes, jusqu’à ce que tout le corps soit d’un rouge uni- forme plus foncé que celui des taches primitives. Pendant que ces signes se manifestent, les vers per- dent leur faculté locomotrice, et s’arrêtent ; les tis- sus de leur corps, perdant leur élasticité et leur mol- lesse, deviennent résistants sous les doigts jusqu’au moment où l’animal meurt et reste endurci dans la posture où il se trouvait à cet instant. Quelques heures après la mort, le corps se revêt d’une efflo- rescence blanchâtre que BrugnaTeLLi a démontrée être un phosphate ammoniaco-magnésien, mêlé à un peu d’urate d’ammoniaque et à une petite quan- tité de matière animale. Le cadavre ne tarde pas alors à se dessécher et à devenir friable. Quelquefois les vers attaqués de la muscardine vont jusqu’à la montée et meurent avant d’avoir terminé leurs cocons, qui sont mous, mal tis- sus et de peu de valeur, et connus sous le nom de chiques, cafignons, etc. Parfois, aussi, ils parviennent à compléter leur travail, et ne périssent qu’après leur transformation en chrysalide ; mais celle-ci se solidifie et ne présente plus qu’une matière jaunâ- tre désorganisée. Au bout de quelques jours, cette matière se dessèche, et la momie se recouvre de l’efflorescence saline blanchâtre. En cet état on lui donne, en France, le nom de dragées ; et, en secouant le cocon, elle rend un son sec qui fait juger, avec certitude, que la chrysalide est calcinée. On n’a pas encore trouvé, malgré quelques annonces pompeuses, de remède efficace contre la muscardine. L’observation rigoureuse des principes généraux d’hygiène peut seule en affranchir une magnanerie. 2° Atrophie, rachitisme (atrofia, gracilita, gattina, covetta, macilenza), maladie qui consiste, aux 1ers âges, dans un développement lent du corps ; le ver attaqué reste plus court et plus petit que ses camarades. Deux causes donnent lieu à cet état pathologique : la 1re est l’altération de la semence, ou une cou- vaison ou éclosion mal dirigée : cet état est incur- able. Quant à la 2e, elle est due à un défaut de soin pendant les mues, à l’entassement des vers sur les claies, surtout dans les 1ers âges, cas dans lequel ils ne peuvent prendre une égale quantité de nourrit- ure et profiter uniformément. En séparant les vers malades, et en leur donnant une nourriture délicate et choisie, et des soins attentifs, ils ne tardent pas à rattraper le temps perdu, et, parvenus au 5e âge, ils filent un bon cocon. Faute d’attention et quand on les laisse avec les autres, ils périssent souvent affamés ou écrasés. 3° La gangrène, noir foncé (cancrena, negrone). Suivant M. le docteur i. Lomeni, la gangrène n’est que la terminaison de 3 autres maladies dont nous allons parler. Elle a pour caractère distinct de réduire le ver en un liquide noir, très fétide, que la peau amin- cie retient à peine et qu’elle laisse bientôt écouler à la moindre distension. C’est un état de sphacèle qui attaque et détruit l’humeur de la soie, et dont les caractères ne laissent pas de doute sur l’existence antérieure d’une inflammation universelle, lente ou aiguë, qui a donné naissance ou entretient les 3 maladies conduisant à la gangrène. Ces maladies sont les suivantes : A. Atrophie. Nous venons de voir qu’elle est due à une altération de la semence ou à une couvaison ou éclosion mal dirigée. Cette affec- tion, développée, offre les symptômes suivants : pet- itesse de la taille, indolence dans tous les mouve- ments, diminution et perte de l’appétit qui porte les malades à abandonner et à repousser toute nourri- ture. Ils quittent tout à coup le lit et se placent hors de la claie ou sur ses bords ;