Page:Maison rustique du XIXe siècle, éd. Bixio, 1844, III.djvu/446

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
432
liv. iv.
ARTS AGRICOLES : DE LA BOULANGERIE.

« Pour commencer le chauffage, dit le Manuel du Boulanger, on choisit une bûche tortueuse et on la place au fond du four ; on la prend tortueuse parce que, devant servir d’appui aux autres, il ne faut pas qu’elle porte de toutes ses parties sur l’âtre, autrement la flamme ne pourrait circuler tout autour. Sur cette 1re bûche on en place 2 autres que l’on croise par les bouts, et sur le milieu de ces dernières, on en met 2 autres disposées de manière que leurs extrémités aboutissent dans les 2 côtés du four. Le bois ainsi arrangé se nomme la charge ; on y met le feu avec un tison enflammé qu’on place à l’endroit qui occupe le fond du four vis-à-vis de la bouche. Quand une partie du bois qui sert de soutien est converti en braise on tire cette braise avec le rouabe, de manière à la placer en tas sur les rives du four. Ainsi amoncelée cette braise se conserve ; autrement elle se consumerait.

« Pour chauffer les autres parties du four, on fait une seconde charge, qu’on appelle charge à bouche, à la distance d’environ un tiers de sa profondeur, et on forme le foyer en plaçant une bûche en travers et 6 à 7 autres bûches fendues en long , par-dessus. Quand cette charge est aux deux tiers brûlée, avec le petit rouable on l’approche de la bouche afin de chauffer cette partie du four, qui est toujours celle où il se fait le plus de déperdition de chaleur.

« Pour les autres fournées on opère de la même manière ; seulement on emploie du bois plus menu et en moindre quantité.

« On juge ordinairement qu’un four est chaud quand la chapelle est blanchâtre. Comme ce signe n’est pas toujours certain, nous ne le donnerons pas pour règle positive, et nous renverrons encore aux conditions de localité, à la position du four, à la quantité et à l’espèce de pâte, à sa forme et à son volume, et surtout à l’expérience.

« Dans tous les cas, il vaut mieux que le four attende après la pâte que la pâte après le four, parce qu’on peut avec quelques morceaux de bois seulement entretenir la chaleur du four, et qu’il y a de grands inconvéniens à suspendre ou arrêter l’apprêt de la pâte.»

Le Guide du Boulanger, par Vaury, présente le tableau suivant de la règle du chauffage.

Coterets de bouleau de 19 po. de tour sur 2 pi. de long. 1re fournée. 2e fournée. 3e. 4e.
1re charge du four et autour 19 coterets. Le bois brûlé on tire la braise. Charge de bouche à 2 pieds du bouchoir, 3 coteret Casser le bois de la grosseur de 4 pouces de tour ; 4 morceaux chaque tas ; 7 tas tout autour du four ; 3 tas à bouchure. id. id.
La consommation du bois n’est pas une charge tout entière pour le boulanger, qui retire une grande partie de la valeur de ce bois par la vente de la braise. On estime que pour une cuisson on 6 fournées on consomme 10/30es de voie de bois qui, calculée à raison de 29 fr. 50 c. rendue dans le magasin du boulanger, donne pour la consommation de 5 fournées 
 9 fr. 83 c.
Une voie de bois brûlé produit 34 boisseaux de braise qui se vend, taux moyen, 40 c. le boisseau, soit pour 10/30es 
 4     53    
—————
Différence par jour 
 5     30    

Soit, par an, 1934 fr. 50 c, somme à laquelle s’élèverait la dépense réelle du bois, pour un boulanger cuisant à Paris 6 fournées de pain par jour.

C’est à tort qu’on a prétendu que le boulanger payait entièrement son bois avec le produit de la biaise. Dans les quartiers où le boisseau de braise se vend plus cher que 40 c., les loyers sont aussi plus considérables ; il serait injuste de calculer autrement que nous ne l’avons fait.

Section VIII. — De l’enfournement et du temps que le pain doit rester au four.

Lorsque le four est chauffé au degré voulu, que la braise est tirée hors du four, le geindre l’écouvillonne et commence l’enfournement du pain. A cet effet, on a placé sur un des côtés le porte-allume afin d’éclairer le four. L’ouvrage doit être combiné de manière que le four se trouve chaud au moment où le pain a pris assez d’apprêt pour être enfourné.

L’enfournement doit s’opérer d’abord par les plus gros pains et ensuite par les plus petits. On place les pains en rangées droites du fond à la bouche, en ayant soin qu’ils se touchent légèrement afin qu’ils ne perdent pas leur forme ; puis on continue l’enfournement par équerre. On arrive ainsi à la place où a été posé le porte-allume, que l’on reporte d’un autre côté et qu’on enlève ensuite lorsque les pains arrivent à la bouche. Alors on ferme le four ; mais on a soin de l’ouvrir 20 minutes après pour s’assurer comment va la cuisson et si le pain prend de la couleur.

Dès que le pain est mis au four la pâte se gonfle, le gaz se dégage, l’air qu’elle contient se dilate et c’est ainsi que se forment dans l’intérieur du pain les cavités qui indiquent que la pâte a été bien travaillée. C’est à la couleur que la croûte acquiert que l’on juge du temps qu’il faut que le pain reste au four. Ce temps ne peut être fixé d’une manière absolue, il dépend de la grosseur des pains et de la nature de la pâte ; mais en général on estime que les pains de 2 kilog. doivent rester au four 35 minutes, et ceux de 4 kilogr. de 50 à 60 minutes.

Parmentier fixe ainsi quelques signes auxquels on reconnaît la cuisson.

1° En ouvrant le four on en voit sortir une vapeur humide qui se dissipe progressivement.
2° La surface du pain doit avoir contracté une couleur jaune brunâtre.
3° En frappant le dessous du pain avec le bout du doigt, il doit bien résonner.