Mais du moins je n’étais pas seul alors ; la présence de ma sœur rendait cette retraite vivante. J’entendais le bruit de ses pas dans ma solitude. Quand je revenais à l’aube du jour prier Dieu sous ces arbres, la porte de la tour s’ouvrait doucement, et la voix de ma sœur se mêlait insensiblement à la mienne. Le soir, lorsque j’arrosais mon jardin, elle se promenait quelquefois au soleil couchant, ici, au même endroit où je vous parle, et je voyais son ombre passer et repasser sur mes fleurs. Lors même que je ne la voyais pas, je trouvais partout des traces de sa présence. Maintenant il ne m’arrive plus de rencontrer sur mon chemin une fleur effeuillée, ou quelques branches d’arbrisseau qu’elle y laissait tomber en passant ; je suis seul : il n’y a plus ni mouvement ni vie autour de moi, et le sentier qui conduisait à son bosquet favori disparaît déjà sous l’herbe. Sans paraître s’occuper de moi, elle veillait sans cesse à ce qui pouvait me faire plaisir. Lorsque je rentrais dans ma chambre, j’étais quelquefois surpris d’y trouver des vases de fleurs nouvelles, ou quelque beau fruit qu’elle avait soigné elle-même. Je n’osais pas lui rendre les mêmes services, et je l’avais même priée de ne jamais entrer dans ma chambre ; mais qui peut